Masha la sans utérus - Raphael Eymery

Je suis surchargé de travail, lecteur. Résultat : des lectures et des chroniques en retard et peu de temps pour rattraper. Alors chroniques courtes, faisons ce qu'on peut dans le temps qu'on a ; as Chaucer said, time and tide wait for no man. Après le décadantiste Pornarina , Raphaël Eymery revient avec Masha la sans-utérus , un roman très noir, réservé par l'éditeur aux adultes. Europe contemporaine. Masha la sans-utérus raconte l'histoire de deux vieux amis. Vieux car se connaissant depuis très longtemps, vieux car tout simplement âgés. Le premier, dont on peut penser un temps qu'il est le personnage principal, se nomme Augustin. Comme ce saint et penseur chrétien qui, après une jeunesse de débauche, devint un ascète de la pire espèce. Comme cet homme qui avait pris le sexe en telle horreur qu’il écrivit «  je suis né dans l'iniquité, et ma mère m'a conçu dans le péché » ainsi que l'inénarrable « c'est entre fèces et urine que nous naissons » . ...

Retombées radioactives en hausse aujourd'hui


Sortie en France de l'adaptation BD du "Do androids dream of electric sheep ?" de K. Dick, le roman qui a servi de base au film Blade Runner.
L'adaptation de roman est un art difficile et souvent décrié. Deux arts différents ne peuvent traiter le même sujet de la même manière. Chaque adaptation donne lieu, de ce fait, au tir d'une salve de questions angoissées, posées par les amateurs de l'oeuvre première. Est-elle fidèle, ou pas, à l'original ? Atteint-elle, ou pas, le même niveau d'intensité ? Conserve-t-elle, ou pas, les idées clés ? Le traitement des personnages est-il conforme à celui du roman ? Et quand bien même les réponses seraient toutes "oui", toute mise en image d'un écrit peut décevoir, lorsque l'image montrée ne correspond pas exactement à l'image imaginée, c'est à dire, statistiquement, à chaque fois.
Que dire donc de ce "Do androids dream of electric sheep ?" de Tony Parker ? D'abord qu'avec un nom d'auteur pareil, ce post est mécaniquement SEO ;-) Ensuite, que le roman de K. Dick est très différent du film de Ridley Scott, plus riche, encore plus sombre, moins straight. Le monde est contaminé par des poussières radioactives (au point qu'il y en a des bulletins météo), les extinctions animales sont un point important de la culture, une religion de l'empathie appelée mercérisme est très populaire, mutations dégénérescentes et schizophrénie sont des éléments importants de l'histoire, de même qu'un média télé omniprésent. Dans son chef d'oeuvre cinéma, Scott a conservé l'ambiance et l'enquête, et, narrativement, il a bien fait. Mais, dans le roman, il y a bien plus. Contexte politique, social, environnemental, en déliquescence, mais aussi questionnement sur l'identité et la nature humaine forment la trame riche sur laquelle se développe la traque des Nexus 6. Parker adapte le roman, il peut donc le faire connaitre aux amateurs du film qui ne peuvent ou ne veulent le lire. Il propose la richesse du texte de K. Dick aux lecteurs pressés, ou à ceux, comme moi, qui l'ont déjà lu et n'ont pas le temps de le relire. De fait, il reprend le texte intégral, ce qui en fait une BD à forte charge textuelle, assez statique, dans laquelle la responsabilité de la narration n'est pas confiées aux images. Ca ne me déplait pas. Et la richesse du texte de K. Dick emporte l'adhésion si on est amateur de dystopie. Effet secondaire un peu ridicule de ce parti-pris, les phylactères sont souvent suivis d'encadrés comprenant le texte "dit-il", texte qui était logiquement dans le roman mais qui est absurde dans une BD.
Graphiquement, la noirceur du monde décrit par K. Dick est parfaitement restituée, avec un trait réaliste, des couleurs sombres, des contrastes saisissants entre l'obscurité des grandes zones désertées et la lumière qui signale les malheureux qui n'ont pas eu la chance de mourir ou de fuir. Il y a quelques décalages entre le texte et l'image mais ils ne sont pas fréquents et ne choquent pas à la lecture.
Premier tome, fort d'une centaine de pages, d'une série de trois, "Do androids dream of electric sheep ?" est une lecture indispensable pour les amateurs de K. Dick, pour ceux qui voudraient s'initier, pour les fans du film souhaitant remonter sans trop d'efforts à la source. Pour beaucoup de monde finalement. D'autant que le hardcover est de qualité, agrémentés de couvertures alternatives, d'interviews d'auteurs connus sur K. Dick, d'une bio, etc...
Do androids dream of electric sheep ? d'après Philip K. Dick, adapté par Tony Parker



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Commentaires

Anonyme a dit…
Intéressant, je ne connaissais pas. Y'aurait pas moyen de mettre une ou deux planches représentatives pour illustrer l'article et se rendre compte d'à quoi çà ressemble niveau dessins ?
Gromovar a dit…
C'est pas très représentatif, mais j'ai pas mieux : http://www.facebook.com/album.php?id=63209291565&aid=277821

Ici aussi : http://www.boom-studios.com/do-androids-dream-of-electric-sheep-21.html

Ou ici : http://www.boom-studios.com/do-androids-dream-of-electric-sheep-20.html

Il y en a sûrement d'autres.
arutha a dit…
Je crois que je n'oublierai jamais la sortie du film de Ridley Scott. À l'époque je prenais une ligne de métro en partie aérienne pour aller bosser. C'est ainsi qu'un beau matin, j'ai pu voir, du haut de ma rame, sur un trottoir, devant une librairie, un placard publicitaire du magazine Métal Hurlant avec ce gros titre : C'est Philip K. Dick qu'on assassine (à propos du film bien sûr). L'article était signé d'un certain Philippe Manœuvre.
Ça peut paraître con à notre époque surinformée (merci internet) mais alors il n'y avait guère que les magazines spécialisés (rares) pour lire des critiques de SFFF, toujours est-il que je suis resté longtemps sans avoir envie de voir le film. Mais la lacune fut comblée.
Il n'en reste pas moins que je suis très intrigué et tenté par cette adaptation BD.
Merci Gromovar.
Gromovar a dit…
Le film est en effet une étrange adaptation du livre, mais c'est aussi l'un des plus beaux films que j'ai vu.
Maëlig a dit…
@Anonyme tu as une preview des 10 premières pages ici : http://www.bdgest.com/preview-848-BD-do-androids-dream-of-electric-sheep-tome-1.html
Je n'ai pas encore eu l'occasion de lire le livre, du coup je vais peut-être attendre de l'avoir fait avant d'acheter le comic.
Effectivement ça fait bizarre ces petits encadrés, m'enfin passé la surprise je suppose que ça ne doit pas être plus gênant que ça.
Perso c'est plus le graphisme qui me fait peur, je trouve que ça ne colle pas trop avec le ton d' l'oeuvre, d'après ce que j'en ai vu je trouve ça un peu trop propret/lisse.
Gromovar a dit…
Difficile de comparer les goûts en matière de graphisme, mais ça ne me parait pas propret.
Tigger Lilly a dit…
Ton titre est particulièrement bien choisi :D
Gromovar a dit…
La réalité dépasse la fiction :-)