Deryn Du - Guillaume Sorel

D’abord, c’est un cadavre de baleine qui empuantit la plage, non loin d’un petit port de pêcheurs du Pays de Galles. Parmi les témoins ébahis, à côté des humains, il y a des mouettes mais aussi des corbeaux. Un poète en villégiature traîne aussi parmi les badauds. Tout ceci, Poe l’aurait apprécié. Puis il y a un meurtre, étrange. Une petite fille et une poupée cassée, qui ne semblent pas être étrangères aux mystères en cours. Puis d’autres meurtres, de plus en plus étranges. Et toujours le poète. Qui comprend, ou sent, ou vibre à l’unisson. Le village de pêcheurs, la nuit, l’ombre, la peur qui rôde. On pense au Geôlier de Florian Quittard. La lande, les fées, un autre monde derrière le monde, on pense à Arthur Machen - le poète le lit. On pense aussi au décadentiste Maurice Rollinat , dont la petite fille (fantôme ?) cite des passages. Le poète sert de passeur entre les mondes, entre la nuit et le jour. Il peut comprendre, il est un passeur de fées, la petite fille l’affirme, in...

Les Mentors - Zidrou - Porcel


Barcelone, 1998. Le jeune Ana est en salle d’accouchement. Le bébé est presque là. What could go wrong ?
C’est alors qu’un commando armé et masqué fait irruption, massacre tout le monde, et s’enfuit avec le bébé – préalablement extrait de sa mère, et non sans l’avoir remerciée.

20 ans plus tard. Joye est une escort girl dont on ne peut pas dire qu'elle a froid aux yeux. Fuyant un proxénète violent qui veut lui faire payer sa défection, elle va d’arnaque en arnaque en direction d’un point de fuite dont elle espère qu’elle pourra s’y mettre définitivement à l’abri.

Sur sa route elle croise Ana. La femme cherche son bébé depuis vingt ans, sous les moqueries feutrées de ses voisins qui la prennent pour une vieille folle. Un commando armé et masqué ? Un bébé volé ? « Offert » même, si on en croit le récit d’Ana ? Qui pourrait croire une histoire pareille ?
Reste qu’Ana, qui à l’air un peu givré de Mulder attendant sa sœur, est une personne bonne qui offre gite et couvert à Joye.

De là, les deux histoires s’entremêlent, car le « propriétaire » de Joye approche, et qu’il semble bien que les hommes qui attaquèrent vingt ans auparavant reviennent aussi dans le jeu.

J’ai déjà dit ailleurs que je trouvais difficile d’instaurer une vraie tension dans un album de BD, le caractère statique et silencieux du médium ne facilitant pas les jumpscares. Il faut donc un art de l’invention scénaristique, de la découpe, de la caractérisation, de la progression, qui n’est pas donné à tous les auteurs. Zidrou fait montre, une fois encore, de ce genre de talent dans ce premier tome de la série Les Mentors, intitulé "Ana".
Les premières pages sont bluffantes, les dernières aussi. Entre les deux, l’avancée logique et rythmée du récit entraine le lecteur, hameçonné par le début et comme tiré par un fil dont il ne peut se libérer, de l’alpha à l’oméga de l'histoire. C’est fort, c’est haletant. Du beau travail.

Comme dans Shi ou dans l’excellent Folies Bergères, Zidrou intègre du fantastique, encore indistinct ici, à son récit, et il faudra attendre le tome 2 pour savoir ce qu’il en sera précisément.

On notera que les dessins de Porcel, très comics, font le job sans défaut, et que ses changements de couleur dominante ponctuent parfaitement le récit. On notera aussi qu'il retrouve ici son compère des Folies Bergères.

Les Mentors t1, Ana, Zidrou, Porcel

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