Horizons obliques - Richard Blake

Sortie demain de Horizons obliques , un one-shot SF de Richard Blake. Il y a des années que Jacob et Elena Armlen se sont perdus dans une dimension parallèle qu'ils tentaient de cartographier. Depuis aussi longtemps Adley, leur fille, veut les retrouver. Après un long entrainement elle part donc en quête de parents depuis trop longtemps absents, à travers des mondes incroyables, avec l'aide de ses grands-parents, d'un impressionnant appareillage technologique de voyage transdimensionnel, de ses dons de prescience, et d'un robot humanoïde nommé Staden. Si le scénario, plutôt contemplatif, pourra désarçonner certains lecteurs, on ne peut qu'être impressionné par la beauté envoutante des planches réalisées intégralement par un auteur qui est peintre avant d'être bédéaste (et dont c'est le premier album) . Dès la première page représentant un rêve d'Adley portant un ours polaire sur son dos on est saisi par le style et la qualité graphique de l'album. L&

Les Folies Bergères : L'élégie du 17ème d'infanterie

Superbe album que ce "Folies Bergères". Beau, émouvant, et plutôt original dans la masse énorme des BD traitant de la Grande Guerre.
Début 1918, Verdun. La guerre n'en finit pas de ne pas finir ni les hommes d'y mourir. Dans une tranchée de première ligne tentent de survivre un capitaine et ses hommes, son frère aussi, devenu prêtre. L'horreur est permanente, lancinante, et bien connue des lecteurs de ce blog : les assauts vers des tranchées ennemies qu'on n’atteindra pas, les morts qui pourrissent dans le no man's land, la balle qu'on prend dans la tête juste parce que celle-ci a eu la malchance de dépasser un peu du sommet de la tranchée, le rata infect qu'on mange au milieu des poux et des rats. Mais, déprimés et désabusés, on se serre les coudes. On donne des noms de plats gastronomiques au salmigondis qu'on mange, on fait danser un pantin comme si c'était le bal, on se promet qu'après la guerre on ira aux Folies Bergères. Le plus tendre est finalement le capitaine, si affecté qu'il se réfugie de plus en plus dans un monde imaginaire, entre rêve et hallucinations.

Et puis survient l'incroyable : un condamné à mort qu'on fusille et qui ne meurt pas.

Superbe récit je le répète. Zidrou renouvelle de manière brillante un genre très encombré.

Mêlant réel et fantastique de manière bien plus convaincante - et utile surtout - que Dan Simmons dans Le grand amant, il livre une histoire dont le mystère finit par être levé de bien poignante manière.

Très documenté, il raconte le désarroi de ces officiers de ligne qui étaient dans leur immense majorité des civils qui avaient cru au message patriotique avant d'en voir la réalité sordide. Il tisse deux belles histoires d'amour, très différentes mais aussi fortes l'une que l'autre. Il rend leur désir sexuel à des poilus trop souvent décrits comme de purs esprits uniquement préoccupés de survivre. Il donne à voir la Voie sacrée, cordon ombilical qui assure la survie des soldats à Verdun mais aussi convoyeur livrant sur le front la chair fraiche dont il se repait. Il montre les soldats pénétrant dans les forts de Verdun comme dans leur tombe déjà. Il décrit de façon très réaliste le désastre d'un assaut échoué et le quotidien un peu fou des tranchées, une folie qui n'est pas sans rappeler celle qu'on observe dans Apocalypse Now par exemple. Il conclut, enfin, en apocalypse.

Et puis le dessin de Porcel est magnifique. Réaliste, expressif, colorisé en aplats gris ou sépia, il montre le champ de bataille comme rarement. On y voit du ciel le terrain lunaire grêlé de cratères d'obus qu'est devenu l'alentour de Verdun (les cratères y sont encore aujourd'hui même si de la végétation les dissimule un peu). On y voit les réseaux de tranchées, toujours en équilibre entre stabilité et effondrement. On y voit les cagnas. On y voit les hommes dans les positions courbées de leur vie précaire ou allongés pour l'éternité sous les yeux de leurs compagnons d'infortune.

92 pages superbes, superbes, superbes. Acheter et lire.

Les Folies Bergères, Zidrou, Porcel

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