Gotham Central t3 - Brubaker - Rucka et al.

Juste un mot pour dire que vient de sortir le tome 3 de la série Gotham Central chez Urban Nomad. Je ne reviens pas sur les caractéristiques et qualités de la série. On les trouvera dans  ma chronique des deux premiers volumes . Elles sont  toujours aussi présentes dans ce troisième et avant-dernier tome. Je viens juste t’allécher, lecteur, avec le sommaire de cet opus. On commence avec Corrigan , une histoire assez courte dans laquelle l’inspectrice Montoya se salit les mains pour impliquer un agent ripou de l’identité judiciaire qui a mis en difficulté son équipier, Crispus Allen, en soustrayant une preuve capitale après une fusillade. Côté famille en revanche, depuis son outing, rien ne s’est arrangé. Quand on a des parents latinos très religieux, ça ne passe pas. Suit Extinction des feux , dans lequel la police de Gotham, représentée ici par le commissaire Akins, rompt définitivement et de manière très visuelle le lien ténu qui la liait à Batman. Une décision qui ne fait ...

Plop - Rafael Pinedo


"Plop" est un court roman de l'Argentin Rafael Pinedo. On y assiste à toute la vie de Plop, né et mort dans la boue, au cœur d'un terrifiant monde post-apocalyptique.

« – Ici, on survit. »
« – Ici, on survit. »
C'est le premier dialogue qu'on entend dans le livre. Il le résume parfaitement.

De la boue, de la boue, partout. Quelques ruines, aucune production de nourriture organisée. Des outils rouillés, des bricolages sommaires, des chiffons.
Une pluie récurrente est le seule eau qu'on puisse boire sans risque ; dès qu'elle touche le sol elle devient polluée. Et comme nourriture, chats et chiens sauvages (et dangereux), rats, cochons parfois (ces éternels compagnons d’infortune de l'homme), humains aussi.
On est mis bas. On est « utilisé » – comme objet sexuel. On remplit ses tâches assignés. On fournit – plus ou moins librement – à la communauté sa chair, sa peau, ou ses os.
Et on a faim, si souvent faim.

Dans le monde de Plop, issu d'une apocalypse, survivre est si difficile que c'est à la fois la seule action possible et la justification de toutes les actions concrètes.

Dans le Groupe de Plop (une centaine d'âmes), tout est tourné vers la survie.
L'organisation d'abord, avec sa hiérarchie fruste et ses Brigades spécialisées (dont Volontaires 2 qui rassemblent les faibles et inutiles, voués aux missions suicides).
La migration, les chasses, les échanges dans les Lieux dédiés, ensuite. Tout s'échange, tout s'utilise, tout se recycle. La rareté est telle que rien ne peut se perdre.

Dans le Groupe (comme dans tous les Groupes du monde), l'individu ne vaut rien en soi. Il n'est qu'une force de travail ou une ressource. Quand il ne peut plus être la première, il devient la seconde. Il peut aussi n'être qu'une ressource utilisable dans le cadre d'un échange.

Le Groupe de Plop, isolé au milieu d'une nature si hostile qu'elle n'en mérite plus le nom et d'autres Groupes aussi acculés et prédateurs, n'a plus comme but que la survie, au point d'en devenir une parfaite communauté conséquentialiste qui n'accorde aucun droit à ses membres. Chacun doit servir la communauté ou mourir pour elle, les ressources sont trop rares pour être gaspillées et même le plus inutiles des inutiles peut au moins être recyclé (clin d’œil au Meilleur des Mondes) pour la servir enfin.

Il n'y a donc aucune morale dans le monde de Plop, aucune impératif surpassant celui de la survie du Groupe. Il n'y a qu'un tabou – passible de mort –, dont on ignore l'origine : nul ne doit montrer l'intérieur de sa bouche ni sa langue à autrui, nul ne doit toucher autrui avec sa langue. Cet unique interdit – dans un monde où l'inceste n'en est pas un car la notion même de parentalité en est absente et que, de plus, « faire le sexe » est une des rares distractions – signe néanmoins le fragile caractère humain de cette bande si peu morale qu'elle se résume presque à sa bestialité fondamentale ; les animaux non plus ne sont pas moraux mais ils ne sacralisent ni ne s'interdisent aucun acte.

Après une longue description – tout en micro chapitres – de la vie quotidienne et du coming of age de Plop, on comprend progressivement que le jeune homme est un Rastignac en puissance qui use de la ruse comme d'un outil vers la fonction suprême de Commissaire Général. Manigances et trahisons le porteront au sommet – du tas de merde dans lequel il vit.
Mais il n'y restera pas. Tabou et coutume sont plus forts même que Plop, et ce Groupe qui va sans sourciller jusqu'au bout de l'inhumain n'acceptera pas qu'on viole impunément son seul tabou.

Description non euphémisée d'un mode de vie ignoble, "Plop" est écrit dans un style aussi clinique que minimal. C'est pourquoi j'ai eu du mal à y entrer vraiment. J'avais eu le même problème avec l'écriture de La Route de McCarthy. Alors si toi, lecteur, tu as aimé La Route, viens lire "Plop", tu aimeras aussi.

Plop, Rafael Pinedo

Commentaires

Efelle a dit…
Je l'ai lu celui-là, j'en garde un bon souvenir.
Gromovar a dit…
Bien aimé mais pas captivé.
TmbM a dit…
Beaucoup de bonnes idées mal exploitées, trop de violence gratuite et une sexualité exacerbée qui, à mon goût, ne se justifie pas. J’ai vu en « Plop » un pétard mouillé...
Gromovar a dit…
Ouais, moi jamais gêné mais jamais captivé non plus. Pur spectateur. Inoffensif donc.
Lune a dit…
Effectivement, j'ai aimé à la fois La Route et Plop !
Gromovar a dit…
Ca se tient :)
Tigger Lilly a dit…
J'ai adoré La route, je suppose qu'il me faut Plop :p
Gromovar a dit…
Sans aucun doute :)