L'Oiseau qui boit des larmes - Lee Young-Do

L’Oiseau qui boit des larmes (tome 1, Le Cœur des Nagas) est un roman de Lee Young-Do, premier tome d’une tétralogie de fantasy. Son auteur serait « Le Tolkien coréen » si l’on en croit le sticker apposé sur la couverture. Diable ! Qu’en est-il ? Le monde imaginé par Lee Young-Do est divisé en deux par une Ligne imaginaire. Au sud de celle-ci vivent les Nagas. Ils s’y sont installés non sans violence dans un lointain passé. Au nord on trouve les autres « humains », qu’ils soient Standards, Rekkons, ou Tokkebis. Les Nagas sont petits. Ils ont le corps couvert d’écailles. Ils entendent mal, ce qui fait qu’ils parlent beaucoup moins qu’ils ne nilhent (une forme de communication par la pensée) . Ils voient en revanche très bien, notamment les différences de température. Ils vivent dans une société matriarcale, sous la domination de matrones qui traitent les mâles comme un cheptel reproducteur – à l’exception des Protecteurs qui ont épousé la déesse et la servent dans un...

Perihelion Summer - Greg Egan - Tiède


On peut reconnaître à Greg Egan un sens aigu du timing. Six jours seulement après la publication de la première photo jamais réalisée d'un trou noir supermassif, sort "Perihelion Summer", sa dernière novella, qui raconte l'effet sur la planète, et donc par ricochet sur nous, pauvres humains, d'une traversée du système solaire par Taraxippos, un micro trou noir.

Un trou noir, non, en fait deux, un trou noir binaire. Ce détail de l'histoire ne sert à rien, si ce n'est à ajouter une artificielle et brève incertitude sur la trajectoire exacte de l'objet et donc sur un possible cataclysme.

Ce malheur dont l'avenir est gros, nous le vivons en compagnie de Matt, un jeune ingénieur australien. Dans la première partie de la novella, Matt et quelques amis, convaincus de l’imminence des tsunamis colossaux à venir qu'amèneraient les effets de marée gigantesques causés par un passage proche, a embarqué – sous les rires de la plupart – sur un étrange esquif de sa conception, le Mandjet (du nom de la barque solaire de Ré), un engin autonome presque jusqu'à l'autarcie qui tire son énergie  du soleil et du mouvement des vagues, désalinise son eau, et produit lui-même les poissons d'élevage qui feront le gros de l'alimentation de l'équipage. Temps, angoisse, puis le verdict.

Taraxippos passe en fait un peu plus loin que prévu – 72 millions de kilomètres, plus de deux fois la distance qui sépara en 2017 la Terre de l'astéroïde 'Oumuamua. Pas d'effet de marée à craindre, la Terre est sauvée. Ou pas.
Car, fidèle à son nom, l'importun génère une attraction suffisante pour modifier légèrement la trajectoire orbitale elliptique de la Terre, la décentrant, avec donc un périhélie qui s'éloigne du soleil et un aphélie qui s'en approche. La Terre verra sa température moyenne augmenter de 15 degrés en été et baisser de 10 degrés en hiver pour ce qui est de l'hémisphère Sud – l'effet sera un peu moindre dans le Nord du fait de l'obliquité de notre planète. Mais, en raison de sa cause même, ce ne sera pas une hausse de 2,5 sur l'année, ce sera vraiment des étés 15 degrés plus chauds et des hivers 10 degrés plus froids. Un changement climatique inimaginable et soudain qui tuera à moyen terme – par ses effets sur le corps humain, les cultures, etc. – des centaines de millions de personnes, entraînera des flux de réfugiés sans précédent, et initiera les conflits internes et internationaux qui accompagnent inévitablement tout bouleversement malthusien.

Dans les parties 2 et 3, alors que le monde s’enfonce dans le chaos, Matt et son groupe conduiront un nombre de plus en plus grand de bateaux de réfugiés, agglutinés autour du Mandjet, dans un aller-retour circulaire Australie/Antarctique dont le but est de suivre le niveau des températures supportables. Ils vivront quelques tribulations et mettront progressivement en place un système de production et de troc fondé sur la confiance, l'embryon d'une culture marine nomade, peut-être la seule réaction adapté aux temps.

Depuis quelques années, Egan a tourné le dos a son approche initiale qui consistait à ne pas écrire pour/sur notre temps – Cf. Cérès et Vesta. Inquiet à juste titre du changement climatique, énervé sans doute (des passages le suggèrent ainsi que la novella susnommée) par la politique très anti-migrants de son pays, il descend dans l'arène militante. Hélas, il y perd ce qui faisait sa singularité (le trou noir n'est qu'un gimmick, et il ne suffit pas de parler lentille gravitationnelle pour que ça fasse de la Hard-SF) et devient l'un parmi d'autres à dire la même chose avec des métaphores différentes.

Si on veut être gentil avec l'auteur, on dira que "Perihelion Summer" est un cri d'alarme nécessaire sur l'imminence d'un danger auquel certains ne veulent pas croire et contre lequel beaucoup n'ont pas le courage d'agir. Si on veut s’adonner à l'intertextualité cuistre, on dira que "Perihelion Summer" est un prequel à La cité de l'orque, ou que la mort annoncée pour la plupart – et singulièrement dans une Australie qui fait avec jusqu'aux derniers instants – rappellent le très fade On the Beach.
Si on pense que « qui aime bien châtie bien », on est forcé d'admettre que le texte ne présente qu'un intérêt mineur et qu'il n'apporte rien de vraiment spectaculaire ou innovant.

Perihelion Summer, Greg Egan

L'avis de Feyd Rautha
L'avis d'Apophis

Commentaires

FeydRautha a dit…
(Pssst, gromo, périhélie et aphélie sont des noms masculins.)
Gromovar a dit…
On m'aurait menti ???
Merci, je corrige.