Deryn Du - Guillaume Sorel

D’abord, c’est un cadavre de baleine qui empuantit la plage, non loin d’un petit port de pêcheurs du Pays de Galles. Parmi les témoins ébahis, à côté des humains, il y a des mouettes mais aussi des corbeaux. Un poète en villégiature traîne aussi parmi les badauds. Tout ceci, Poe l’aurait apprécié. Puis il y a un meurtre, étrange. Une petite fille et une poupée cassée, qui ne semblent pas être étrangères aux mystères en cours. Puis d’autres meurtres, de plus en plus étranges. Et toujours le poète. Qui comprend, ou sent, ou vibre à l’unisson. Le village de pêcheurs, la nuit, l’ombre, la peur qui rôde. On pense au Geôlier de Florian Quittard. La lande, les fées, un autre monde derrière le monde, on pense à Arthur Machen - le poète le lit. On pense aussi au décadentiste Maurice Rollinat , dont la petite fille (fantôme ?) cite des passages. Le poète sert de passeur entre les mondes, entre la nuit et le jour. Il peut comprendre, il est un passeur de fées, la petite fille l’affirme, in...

Mice Templar TPB 5 - Glass Oeming - Apothéose


Mice Templar, suite et fin. Et quelle fin !
Fin de trois ans de lecture pour moi, pour une série qui s'est étalée sur sept années de publication et 39 épisodes tous chargés jusqu'à la gueule d'un souffle rarement égalé dans le monde des comics, à fortiori animaliers.

Et cette fin est grandiose. Héroïque, larger than life, Karic mène l'ultime assaut contre Dealrach Ard-Vale, la capitale du roi-fou Icarus le bien nommé, à la tête des Templiers rassemblés derrière sa bannière. Tout ce que son monde compte de combattants le suit, alors que, dans la ville même, la résistance interne se soulève. Avec un tel casting, de tels combats, une telle démesure (exprimée dans les planches), une telle conclusion, on est dans de la fantasy de haut vol qui rappelle, pour décentrer la comparaison, autant The Longest Day que La Chute.

On court, on vole, sur les traces des assaillants, on tremble avec les civils – éternelles victimes – pris au piège des combats, on voit le courage et l'abnégation des libérateurs, la folie de la Cour royale, la vilénie irrépressible du traître éternel Pilot, les hauts faits d'armes, les exploits individuels, le sacrifice de ceux qui tombent au combat et la tristesse de leurs compagnons d'armes, les retrouvailles des familles ou des amis trop longtemps séparés.
On assiste avec plaisir à l'échec d'un plan de domination très ancien.
On voit une ville et un monde libérés à la fois d'un tyran et d'une ancienne malédiction entrer dans un ère nouvelle et plus libre, qu'il faudra s'efforcer de rendre meilleure que celle qui l'a précédée.

Comme Bendis qui préface, je ne suis habituellement guère fan de l’humanisation des animaux. Et pourtant, comme Bendis, je suis séduit, subjugué même. Car ici les animaux humanisés sont aussi et d'abord des animaux, et que donc ici le fait sert le récit. C'est à la libération des plus petits, brimés par ceux qui les dominent physiquement et manipulés par ceux qui leur ressemblent trop pour être honnêtes, qu'on assiste. Le héros aux mille et un visages s'actualise dans une toute petite souris prête à tous les sacrifices pour libérer les siens, et son armée est une armée d'êtres aussi petits que lui qui s'élèvent par leur bravoure et leur noblesse très au-dessus de leur piètre condition physique.

Quelle ampleur dans le récit ! Quels personnages (si nombreux et si finement ciselés) ! Quelle force dans le dessin ! Quelle superbe réinvention des grands mythes humains !
C'est un travail impressionnant qu'ont réalisé les auteurs Glass, Oeming, Santos, Guerra, et les autres. Qu’attendent les éditeurs comics français pour relancer cette saga (Milady l'avait tenté puis abandonné) qui n'a rien à envier aux grands récits mythologiques ?

Mice Templar vol. 5, Night's End, Glass, Oeming, Santos, Guerra

Commentaires

Xapur a dit…
Faut que je m'y mette enfin !

(si tu es d'accord avec Bendis, je suis inquiet par contre, tellement le bonhomme me déçoit régulièrement^^)
Gromovar a dit…
C'est à la fois très classique et superbement écrit.
Et pour Bendis, même une pendule arrêtée donne l'heure juste deux fois par jour.