La Dissonance - Shaun Hamill

2019, quatre adultes qui furent jeunes et le sont moins maintenant sont invités à une commémoration dans leur ancien lycée de Clegg, une petite ville du Texas. Les vies actuelles des quatre anciens élèves, qui ne se sont pas revus depuis des années (et auquel s'ajoutera un cinquième protagoniste involontaire, Owen, encore adolescent) , illustrent, hélas pour eux, diverses formes de l'échec professionnel, sentimental et social. On comprend vite qu'une partie de l'explication à ces vies insatisfaisantes se trouve dans des événements tragiques survenus à la fin des années 90 alors que les « héros » (ce n'est pas le mot juste) du roman était encore scolarisés au lycée de Clegg. Et que de vieilles histoires sont encore à régler. La Dissonance est le second roman de Shaun Hamill qui avait offert au lectorat le très réussi Une Cosmologie de monstres . C'est une friandise pour nostalgiques de bike stories des 80's (même si ici, âge aidant, c'est en voiture qu...

La fabrique pornographique - Lisa Mandel - A l'usine


Juste un petit mot sur "La fabrique pornographique", un des premiers opus de la collection Sociorama de Casterman, dont l’objectif avoué est de mettre la connaissance sociologique à la portée du grand public en traduisant en bandes dessinées des études publiées.

"La fabrique pornographique" donc, est un ouvrage de Lisa Mandel qui adapte Le travail pornographique, enquête sur la production de fantasmes, ouvrage sociologique publié par Mathieu Trachman à la Découverte. Qu’en dire ?

C’est pour moi une relative déception. Le projet, tel que défini par ses concepteurs, était de dépasser l’adaptation littérale en « créant des fictions ancrées dans les réalités du terrain. ». Lisa Mandel et Yasmine Bouagga l’expliquent : « On a cherché à s’adresser au plus grand nombre, mais nous n’avons pas voulu faire de la sociologie illustrée. La démarche, c’est vraiment de faire passer ces analyses sociologiques à travers un univers, des histoires, une fiction. »
Le résultat, c’est que ce n’est plus de la sociologie dans ce qu’elle a de profondément problématisée – condition indépassable du dépassement du sens commun, c’est au mieux une histoire anecdotique très bien documentée. Ca peut intéresser un public qui veut se renseigner un peu sans trop se prendre la tête, mais ça reste quand même bien léger. De plus, quand des données historiques ou des chiffres sont transmis au lecteur, c’est fait d’une manière si explicite qu’on comprend que ce moment narratif est celui de la transmission. C’est donc un peu artificiel ; il y a un aspect « physique amusante » dans le résultat. Passe mieux la démonstration des pratiques concrètes, même si là aussi, parfois, l’énonciation est clairement orientée vers un lecteur dont l’auteur a connaissance de la présence.

Et pourtant, ce n’est pas déplaisant à lire. Et pourtant, on peut y apprendre un certain nombre de choses.

A travers l’histoire d’Howard, vigile noir qui se lance par hasard dans le porno amateur et  y entraine sa copine avant de passer, avec elle, au pro, on découvre l’univers de la production de fantasmes.
On y visite un monde parfois cocasse d’où la violence paraît absente mais où le racisme commun est présent, où la différenciation par sexe existe (salaire et carrière différenciés des acteurs et des actrices), plutôt au désavantage des hommes, où l’offre dans la forme des fantasmes s’adapte à la demande autant qu’elle la crée, où la hiérarchie des notoriétés est synonyme de hiérarchie des rémunérations. On y voit le travail (au sens strict) de tournage avec ses moments plaisants et ceux qui le sont moins, les coups de gueule, les fous-rires, les accidents du travail. On y voit aussi la construction de la visibilité explicite des actes sexuels avec ces positions abracadabrantesques et fatigantes (TMS ?) qui permettent de donner un bon point de vue à la caméra. On y voit enfin les changements rapides dans les attentes d’un public qui demande sans cesse le renouvellement, tant des protagonistes que des actes. Les carrières sont courtes (surtout pour les femmes), autant par obsolescence de la nouveauté que par lassitude personnelle.

On pénètre (désolé !) en fait un monde du travail avec ses contraintes économiques, techniques, personnelles, ses normes, ses motivations, sa culture, ses pratiques, sa monotonie aussi et l’ennui qu’elle génère. La fabrique pornographique : juste un secteur un peu particulier (et encore, juste sur un plan moral que la sociologie se doit d’ignorer) de l’entertainment. On y retrouve des mots et des gestes qui sont dans leur essentialité ceux du monde du travail.

C’est donc clairement un peu léger (la réduction de la masse sociologique à quelques personnages choquera le puriste) mais finalement pas si mal et sans doute instructif aussi.

La Fabrique pornographique, Mandel, d’après Trachman

Commentaires

Lorhkan a dit…
C'est bien joli tout ça, mais elle est où Clara Morgane ? :D
Gromovar a dit…
Pff, même pas en dessin.