Après
De taille et d’estoc, "
Férir ou périr" (un bien joli titre) est le second ouvrage à raconter la jeunesse de Guilhem d’Ussel, le héros des romans médiévaux de Jean d’Aillon.
Peu de temps après les événement narrés dans le premier volume, Guilhem d’Ussel, chevalier errant, veut entrer au service du roi de France, Philipe Auguste. Accompagné de son écuyer Gilbert, il se rend pour cela à Paris, capitale d’un royaume troublé par les prétentions de Jean Sans Terre et ses manigances concernant le paiement de la rançon de Richard Cœur de Lion ; Paris, ville aussi dans laquelle sévit un mystérieux assassin surnommé la Licorne car il tue à l’aide de carreaux d’arbalète gravés d’une licorne. Si les cibles de la Licorne sont des proches conseillers de Philippe Auguste, son identité comme ses motivations profondes restent inconnues. Il semble néanmoins que le tueur soit proche de trois femmes dont Guilhem d’Ussel a fait la connaissance dans la capitale, pour certaines à tous les sens du terme. Soupçonné à tort d’avoir partie liée avec la Licorne, il devra partir pour une Normandie sous la férule de Jean Sans Terre afin de prouver son innocence mais aussi de libérer une dame, brutalement enlevée, à qui il avait donné sa foi.
Je ne reviens pas ici sur la qualité de la reconstitution que livre d’Aillon. Le détail est dans ma première chronique. Je ne reviens pas non plus sur la langue de d’Aillon, médiévale au sens le plus fort du terme. Je ne parlerai pas plus de la qualité de la documentation historique, attestée si besoin en était par le nombre très élevé des notes de bas de pages précisant tel point historique, juridique ou topographique.
Je dirai seulement ici que "
Férir ou périr" est un grand roman d’aventure médiéval qu’offre l’auteur à ses lecteurs. Ou plutôt, aussi, un roman de grande aventure. D’Aillon n’émousse pas son stylo, il raconte « à outrance ». Les sentiments sont grands, les héros nobles, les traitres infâmes, pièges et menteries abondent, et il est bien difficile de sortir avec sa vie de combats toujours meurtriers et sanglants. D’Ussel et ses compagnons font face à des périls nombreux et terribles, qu’ils surmontent tous tant sont grands leur courage et leur habileté. C’est à du grand spectacle que l’auteur convie son lectorat, parfois un peu trop
larger than life, peut-être, pour être totalement crédible mais c’est la loi du genre ; c’est l’énormité des obstacles qui se dressent sur sa route qui font du héros le personnage hors du commun que le lecteur aime admirer. Et, en dépit de l’importance que le récit accorde à l’action, les personnages sont justement développés, et leurs actes comme leurs pensées paraissent conformes à ce qu’on peut attendre d’individus pétris des valeurs médiévales.
C’est enfin l’habileté d’Aillon de lier plusieurs récits entre eux, plusieurs histoires entremêlées, plusieurs secrets ; ce qui se donne à voir n’est que mise en scène de la vérité. Les protagonistes du roman restent longtemps dans le noir sur les tenants et aboutissants des affaires qui se déroulent, réduits à hypothèses et conjectures. Le lecteur aussi est troublé un bon moment par l’intrication des évènements. La vérité est juste au bord du champ de vision, juste au-delà.
"
Férir ou périr" est donc un roman excitant et intrigant, d'une lecture rapide et agréable. Pour peu qu’on aime autant que moi ce type de récit, on y assiste avec plaisir à la résolution de maints complots permise grâce à des actes de grande loyauté et de grande bravoure, ainsi qu’au juste redressement de torts anciens. On y voit encore un d’Ussel à la personnalité flamboyante, peint plus que jamais en héros tragique à qui la vie ne paie jamais en bienfaits les qualités morales.
D’Aillon est peut-être aujourd’hui en France le seul tenant du roman d’aventure médiéval. Il fait explicitement référence à Walter Scott. C’est en effet dans cette veine qu’il se situe et à l’auteur d’Ivanhoé qu’il paie hommage – le prénom Rowena utilisé dans "
Férir ou périr" n’est évidemment pas anodin. L’époque à part, c’est aussi à Féval ou à Dumas qu’on pense en lisant "
Férir ou périr". C’est un plaisir, peut-être un peu régressif, mais intense et véritable.
Férir ou périr, Jean d’Aillon
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