Descente - Iain Banks in Bifrost 114

Dans le Bifrost 114 , on trouve un édito dans lequel Olivier Girard – aka THE BOSS – rappelle que, en SF comme ailleurs, un part et un autre arrive. Nécrologies et anniversaires mêlés. Il y rappelle fort justement et pour notre plus grand plaisir que, vainquant le criminel effet de génération, Michael Moorcock et Big Bob Silverberg – les Iguanes de l’Imaginaire – tiennent toujours la rampe. Long live Mike and Bob !! Suivent les rubriques habituelles organisées en actualité et dossier : nouvelles, cahier critique, interview, biographie, analyses, bibliographie exhaustive, philofiction en lieu et place de scientifiction (Roland Lehoucq cédant sa place à Alice Carabédian) . C'est de Iain Banks qu'il est question dans le dossier de ce numéro, on y apprendra que la Culture n’est pas seulement « ce qui reste quand on a tout oublié ». Dans le Bifrost 114 on pourra lire une jolie nouvelle de Iain Banks, intitulée Descente et située dans l’univers de la Culture (il y a des Orbitales)

Sky is the limit


"The strange affair of Spring-Heeled Jack" c'est le Rocky Horror Picture Show en livre. Mark Hodder a pris l'énormissime Sir Richard Francis Burton, le mystérieux Spring-Heeled Jack, et en a fait les héros d'un roman steampunk et uchronique complètement déjanté.
Sans dévoiler trop de l'intrigue, je dirai seulement que Spring-Heeled Jack est un croquemitaine réel de l'ère victorienne, connu en Angleterre mais ignoré en France, car n'ayant pas, comme l'autre Jack, spécialisé dans l'éventration celui-là, tué des prostituées, mais seulement agressé sexuellement des jeunes filles du peuple (dont certaines étaient sûrement femmes de ménage), sa notoriété n'a pas franchi la Manche. Sa petite histoire personnelle entre en collision avec la grande Histoire quand il croise les routes de la reine Victoria, du 1er ministre Palmerston, et de Richard Burton. Mais dans "The strange affair of Spring-Heeled Jack" il y a aussi, Darwin, Galton, Brunel, Swinburne, Nightingale, les pré-raphaëlites, etc... Tous sont utilisés dans le récit, tous sont dans des situations et des postures assez incroyables, tous mettent à rude épreuve la suspension d'incrédulité du lecteur. Mais quel plaisir s'il y parvient. Le roman est un roller-coaster qui saisit le lecteur et l'emmène toujours plus loin dans la folie.
Uchronie, steampunk, paradoxes temporels, Hodder mêle habilement les genres au service d'une enquête qui n'est pas sans rappeler Sherlock Holmes (le petit rôle tenu par Oscar Wilde est significatif). Dans un Londres de 1861, bien plus avancé techniquement que celui que nous avons connu, mais aussi atroce socialement (misère sociale, pollution, et statut inférieur de la femme sont longuement décrits), Burton et son ami Swinburne, étrange et amusant équipage s'il en est, et vraiment très différent du couple Holmes/Watson, traquent un Spring-Heeled Jack dont les méfaits s'étalent sur presque trente ans. Mais il y a aussi, dans ce Londres alternatif, des loups-garous, des cyborgs, du mesmérisme, des petits ramoneurs, de l'amour (euh, non, au contraire en fait). On y trouve aussi des considérations sur le poids des conventions et l'amour de la liberté. Hodder ne se donne aucune limite, et son roman va dans l'excessive imagination là où peu sont allés avant lui, ce qui lui a sans doute valu le Philip K. Dick Award 2010.
"The strange affair of Spring-Heeled Jack" prouve par l'absurde qu'il est très dangereux de tripatouiller la trame du temps, et s'il en était encore besoin, que le mieux est l'ennemi du bien.
Les seuls bémols que je mettrais sont l'existence d'une longue partie dans laquelle l'histoire est revue à travers les yeux du croquemitaine et qui aurait gagné à être plus courte et off, un personnage de Spring-Heeled Jack qui ne suscite jamais l'empathie alors que son sort est tragique, et une "bataille finale" peut-être un peu trop longue aussi et stylistiquement différente de ce qui précède. Malgré ces défauts, le roman est d'une lecture très agréable.
The strange affair of Spring-Heeled Jack, Mark Hoddder

Lu dans le cadre du défi steampunk

Commentaires

Isil a dit…
Il me faut ce livre absolument (tant pis pour ma pal). Ere victorienne et Richard Burton, personnage qui me fascine depuis que j'ai vu le film "Aux sources du Nil": ça a été écrit pour moi.
Gromovar a dit…
Isil, je t'aime. Tu es la seule personne qui quand je dis Richard Burton ne croit pas que c'est le mari d'Elisabeth Taylor.
Blop a dit…
Le mec, il dit "des fora" et non pas "des forums" comme nous autres, les ploucs non latinisant. Chapeau bas, M. Anudar. J'en reste baba !
Anonyme a dit…
Merci, je prends bonne note de ce livre, il y a bien ces derniers temps un retour en force de l'époque victorienne mais les bons livres restent aussi rare. Vivement qu'il sorte en poche !
Gromovar a dit…
Garde l'oeil ouvert. C'est en anglais pour l'instant, tu l'auras noté.