Il y a un an était lancé le Prix Jacques Sadoul de la nouvelle par l'association des Amis du Diable. Le Prix est un concours qui récompense chaque année le meilleur texte de « mauvais genre », jugé en fonction de sa qualité d’écriture, de l’imagination dont fait preuve son autrice ou son auteur, de son originalité et de son respect, ou de son irrespect assumé et conscient, des codes propres au genre choisi.
Chaque année, l'un des cinq grands genres – science-fiction, policier, érotisme et romance, fantasy et alchimie, fantastique et ésotérisme – est choisi et les nouvelles candidate doivent y inscrire leur texte.
Autre contrainte formelle (parfois respectée dans une acception très lâche) : le texte doit contenir une phrase imposée de Jacques Sadoul, celle de la première édition étant « Je vais au café pour lire le journal d’avant-hier ».
La première édition a eu lieu et, comme convenu, la nouvelle lauréate, Un écho magistral de Jacques Carpentier, ainsi que ses dauphines (!) sont publiées dans un recueil éponyme édité au Diable Vauvert.
Ca parle : civilisation de céphalopodes explorateurs, influenceuse du futur, perturbation cosmique bouleversant l’alignement des astres, livre de Schrödinger, société ultra-connectée, meurtrier perfectionniste devant revivre son crime, sortie au bistrot du coin d’une survivante d’apocalypse, voyage temporel de Jules Verne, motivations glaçantes du boucher de Hong-York, mission spatiale désespérée, enseignante humaine devant une classe extraterrestre, coûteux programme de résurrection, effondrement avec Taylor Swift, mutinerie improbable, guerre urbaine…
Recueil de nouvelles donc textes très différents tant dans le fond que dans la forme. On aime l'un et pas l'autre en fonction de la rencontre possible ou impossible entre un texte court qui doit donc convaincre vite et un lecteur que tout ne peut pas convaincre. C'est le jeu, toujours le même à la lecture d'un recueil.
Quelques impressions sur les textes que j'ai vraiment appréciés :
- Le Jour où les étoiles ont fait demi-tour, de Eric Abbel est sans doute le meilleur texte du recueil. A partir d'un postulat physiquement absurde, Abbel raconte une histoire palpitante avec un vrai suspense et une vraie voix. Une réussite.
- Le Goût amer de la justice de Dora Rosselet est moins surprenant qu'il ne le voudrait mais il illustre de manière intéressante la façon dont les normes les plus évidentes ne sont jamais que les normes d'une société donnée. A méditer.
- Le Bistrot du coin de Jean-Marc Ligny revient dans un univers qui rappelle celui de son magistral Exodes. Il offre une fin optimiste, ou pas ; à voir.
- Avec Vingt-sept mille kilomètres-heure, André David propose un court texte triste qui résonne un peu avec le Liberation de Tade Thompson.
- Le Progrâme de Vincent Tassy est un bel exemple de nouvelle à chute réussie.
- Le Grand saut, de Nicolas Tellop, est franchement weird, franchement zarb, franchement drôle (si on sait rire jaune). Et il y a Taylor Swift;)
- Enfin, Les Révoltés du Balto, de Baron Zilief, est un texte qui impressionne par la maîtrise du Giscard-punk dont fait montre un auteur né en 1975.
Enfin – on ne comprendrait pas que je n'en dise rien – Christophe Carpentier, je n'y arrive toujours pas.
Un écho magistral, Collectif
Commentaires