Bog People - Hollie Starling

Bog People est une « Working-class anthology of folk horror » , éditée par Hollie Starling.   Working-class anthology car, dixit Starling en préface, les textes rassemblés dans ce volume parlent de cette classe populaire britannique qui est l’objet d’une attention ambivalente de la part des CSP+, dans une société où le système des classes est bien plus évident et prégnant qu’en France. Working-class anthology encore, car dixit toujours Starling, les auteurs réunis ici ont montré patte blanche sur leur appartenance présente ou passée à la classe populaire. Une forme de #OwnVoices donc. Fidèle à l’assertion de Max Weber selon laquelle il n’est pas besoin d’être César pour comprendre César, je suis toujours aussi peu fan de cette approche ; nous verrons bien, rien ne dit que ça nuise.   Folk horror ensuite car c’est du peuple tel qu’en lui-même que veulent nous parler ces textes, de ce peuple britannique qui continue à exister loin de la modernité mo...

De l'espace et du temps - Alastair Reynolds


Dans un avenir plutôt proche, John Renfrew est seul sur Mars. Pas comme Mark Watney, ce héros de Seul sur Mars qui attend avec espoir un secours qui finira par arriver. Plutôt comme le dernier survivant d’une base martienne qui vient d’inhumer sa dernière coéquipière et n’attend presque rien d’une Terre où ne vit sans doute plus aucun humain après qu’un virus militarisé ait anéanti l’espèce humaine jusque dans sa lointaine colonie spatiale.

Que faire quand on est seul ? Le dernier ? Pourquoi continuer à vivre ?


Pour un homme dans son inédite situation l’ennemi est l’espoir. Celui d’un miracle qui le sauverait. Tuer l’espoir et consacrer son temps à autre chose qui le remplisse, indépendamment de toute attente, paraît être la seule planche de salut. Il l’a compris, c’est le pianiste de la base qui lui a expliqué. Un pianiste qui n’existe sans doute que dans le cerveau ébranlé de John.

L’homme se jette alors dans l’étude de la cosmologie avec les moyens dont il dispose dans la base martienne. Mais, parce qu’il est si difficile à tuer cet espoir ce sale espoir dont se raillait le chœur d’Antigone, ou alors simplement pour ne pas devenir fou – ou bien au contraire parce qu’il l’est devenu –, John Renfrew continue d’aller régulièrement écouter si un signal radio vient de la Terre. Et voilà qu’un jour il détecte une modulation en approche. Nette, claire, impossible à nier. Et que de là tout bascule, à tous les sens possibles du terme.


De l’espace et du temps est une novella cosmologique d’Alastair Reynolds. On y voit John Renfrew partir à l’assaut de l’explication de l’univers, du sous-jacent théorique qui explique tout et que toute expérimentation valide. Pour accomplir la quête proprement popérienne qui doit le mener jusqu’au moment où plus rien n’est falsifiable car tout a été démontré ou alors prouvé par l’expérience, il lui faut une aide non humaine incroyablement puissante, des abîmes de temps, et l’abandon de tout ce qui constituait son humanité matérielle. A ce prix seulement, l’astronaute abandonné, qui peinait comme quiconque à concilier vision relativiste et vision quantique de l’univers, approche puis finit par atteindre une Théorie Globale dans laquelle il n’y a plus rien à falsifier.


Ayant laissé derrière lui sa carcasse d’astronaute, John Renfrew, libéré par un pouvoir si grand qu’il a pour seules limites celles de son imagination, a vu tout l’univers, l’a compris jusqu'à sa trame ultime, jusqu’à être presque capable d’en faire naître un autre. Supériorité de l’écrivain qui imagine sur l’astronome qui cherche.

Voila peut-être pourquoi Alastair Reynolds a décidé un jour de 2004 de cesser d’être astrophysicien à l’ESA pour se consacrer uniquement à sa carrière d'auteur SF. Nous, toi et moi, lecteur, y avons gagné quelques belles créations, souvent structurées de temps long. Ce texte en fait partie même si on peut lui reprocher une certaine froideur. Mais le jour où un roman de blanche offrira une métaphore popérienne qui passe par la création d’un super-être n’est pas encore arrivé. Alors ne boudons pas notre plaisir. SF rulez !


De l’espace et du temps, Alastair Reynolds

L'avis de Feyd Rautha

Commentaires

tadloiducine a dit…
Tiens, encore un titre avec la planète Mars que j'ignorais... Je me le note pour une de mes futures lectures!
En attendant, est-ce que vous accepteriez que votre billet soit référencé pour le "Challenge martien (autour de la planète Mars) - 2e édition" qui court jusqu'au 31 mars 2025? [oui encore un challenge, après... et avant "Les épais de l'été"!]
Si accord, il vous suffit de m'en informer par un commentaire sous le billet récapitulatif du challenge (dans l'idéal, vous pourriez mettre logo et lien du challenge dans votre propre billet, mais bon...).
(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
tadloiducine a dit…
Ca y est, je l'ai lu (billet aujourd'hui 2 septembre, merci).
Relire le vôtre (de billet) m'a permis d'avoir la curiosité de suivre le lien vers Karl Popper (que je ne connaissais pas, merci!), et de "mettre à jour" ma réflexion sur l'auteur (la bio du 2e de couv' signale juste qu'il a longtemps mené une double carrière d'écrivain et d'astrophysicien à l'ESA). Ecrivain, oui, mais pas dans n'importe quel genre: en "littérature de l'imaginaire"!
Gromovar a dit…
Découvrir Karl Popper, c'est toujours un moment intéressant.