Mirror Bay - Catriona Ward VF

Sortie de Mirror Bay , la version française de l'excellent Looking Glass Sound de Catriona Ward. C'est encore une fois magistral, tortueux, émouvant et rempli de faux-semblants  (il faut en profiter, ce n'est plus le cas dans le décevant Sundial pas encore sorti en VF) . Ne passe pas à côté, lecteur.

Le Testament d'Erich Zann - Brian Stableford


La Musique d'Erich Zann est une nouvelle de Lovecraft aussi inquiétante qu’envoûtante. On y voit un violoniste âgé et muet nommé Erich Zann jouer jusqu'à l'effroi et la perdition une musique si étrange qu'elle semble d'un autre monde. Se liant peu ou prou d'amitié avec l'étudiant pauvre qui lui sert de voisin, Zann – dans le garni misérable qu'il occupe en haut de la tortueuse rue d'Auseuil, au cœur d'un vieux quartier d'une ville qui pourrait être Paris – joue volontiers pour son jeune admirateur mais refuse obstinément de lui jouer la musique singulière qu'il n'interprète que seul et de nuit, au grand dam de son seul auditeur.

Une nuit de troubles, l'étudiant finit par pénétrer chez le violoniste qui promet de lui expliquer ce qui se joue réellement. Cette promesse ne sera jamais tenue car tout à coup Zann se remet à jouer plus follement que jamais, semblant chercher à repousser par sa musique seule une chose qui tenterait d'entrer par la fenêtre. Après de nouveaux troubles et plus de charivari, et après avoir vu par la fenêtre un paysage qui n'avait rien de terrestre, l'étudiant tente, dans le noir, de tirer Zann hors de la pièce, pour découvrir qu'il était déjà mort alors même qu'il jouait encore. S'en suit une fuite éperdue dans une ville qui n'avait jamais cessé d'être normale ; plus tard le jeune homme ne parviendra jamais à retrouver la rue d'Auseuil.


"Le Testament d'Erich Zann" est une novella de Brian Stableford. Elle offre une suite au texte. L'auteur y mêle HPL et Poe dans un récit plutôt réussi.


Paris, années 1840. Le chevalier Dupin (le personnage de détective génial créé par Poe, qui s'illustre entre autres dans Double Assassinat dans la rue Morgue et La Lettre volée) découvre – par l'entremise de son ami le préfet de police de Paris – qu'un inconnu cherche à retrouver le legs d'Erich Zann, testament et/ou violon. Assisté par son inséparable ami – dont on comprend qu'il est celui qui fournit à Poe les histoires que l'Américain écrit – Dupin se lance sur les traces du conspirateur.

Il faut savoir, pour comprendre l'implication de Dupin, que celui-ci ainsi que quelques autres personnes dont le futur préfet de police était présents après la mort de Zann, et qu'ils ont procédé à son inhumation secrète ainsi qu'au partage du legs du violoniste. Alors que les mesméristes intriguent et que les morts s'accumulent parmi les protagonistes de l'histoire, Dupin, son ami, et le préfet se lancent dans une course contre la montre pour retrouver le coupable et le mettre hors d'état de nuire.


Avec "Le Testament d'Erich Zann", Stableford offre un crossover réussi entre les univers de Poe et de Lovecraft. Il reprend à son compte un Dupin logicien qui n'est pas sans rappeler Sherlock Holmes par sa personnalité et ses méthodes, d'autant que son inséparable ami est aussi discret, fidèle, et un peu souffre-douleur que Watson l'est pour le détective londonien, et qu'il y a même dans le récit un inspecteur Lestrade (Stableford s'amuse).

Il traite l'enquête comme un problème classique en intégrant la part surnaturelle qu'elle renferme comme un simple donné à prendre en compte sans plus de cérémonie – son approche « matérialiste » de l'impossible est aussi lovecraftienne qu'elle est holmesienne.

Il déroule une course poursuite trépidante au rythme de thriller dans les rues du Paris de Louis-Philippe.

Il crée une histoire au riche background qui implique un Stradivarius inconnu, le grand Paganini, ainsi que Tartini et ses trilles du diable, tous adeptes d'une périlleuse scordatura. Mais ici, c'est le violon qui se réaccorde lui-même, c'est le violon qui joue plus qu'il n'est joué.

Et, la maison ne reculant devant aucun sacrifice, Stableford invite Nyarlathotep à la fête, ainsi que des Contrées du Rêve que certaines musiques permettraient d'entrevoir au risque de leur ouvrir une porte.


« Nulle part on ne touche aux formes de la musique sans toucher aux lois les plus importantes de la cité », écrivit Platon. Ici, à cause d'un singulier violon, c'est les lois du monde qui sont en péril. Grand danger pour les héros, grand danger pour la ville et le monde. Traitant de façon rationnelle des phénomènes surnaturels, Dupin parviendra-t-il à garder le contrôle sur une situation que Zann ne put maîtriser ?


"Le Testament d'Erich Zann" est une novella réussie qui pourra plaire autant aux lecteurs du texte d'HPL qu'aux autres qui seront guidés par Stableford et à qui les racines de l'affaire seront clairement exposées.


Le Testament d'Erich Zann, Brian Stableford

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