La grande muraille de Mars - Alastair Reynolds

La grande Muraille de Mars est la version française du méga recueil d’Alastair Reynolds intitulé en VO  Beyond the Aquila Rift . Dans des traductions de Pierre-Paul Durastanti, Laurent Queyssi et Florence Dolisi, ce sont pas moins de 16 textes (2 de moins que dans la VO) qui s’étalent sur 640 pages. Au fil de ces milliers de signes c’est l’avenir imaginé par Alastair Reynolds qui se dévoile aux yeux ébahis du lecteur amoureux de SF. Car c’est bien de SF qu’il s’agit ici. Toujours. Même quand ça peut ressembler à autre chose. Certains de ces textes appartiennent au Cycle des Inhibiteurs , ce cycle bien connu de notre club qui raconte l’histoire future d’une humanité spatiopérégrine et divergente dont les différentes branches, souvent en conflit armé, se distinguent par leur degré de fusion avec les machines. C’est le cas notamment des deux premiers, La grande muraille de Mars et Zéphyr qui racontent, de transhumanisme en tentative de génocide, les débuts de la divergence et les ...

The Angel Era - Liu Cixin


"The Angel Era" est une nouvelle SF de Liu Cixin, téléchargeable en version anglaise sur Internet (récupérable ici). J'ai lu presque par hasard les douze pages A4 serrées qui la constituent. Elles ont résonné étrangement en moi.

En effet, je sortais juste de l'imposant The Old Drift – de Namwalli Serpel – qui se passe en Zambie, et voilà que la nouvelle de Liu annonçait dans sa première phrase que l'attaque contre la Saambia était imminente ; impression de tomber sur un harmonique. Puis je lus le reste. Et l'impression augmenta.

Futur proche. Le Conseil de biosécurité de l'ONU – l'organe international qui autorise ou interdit les expériences et manipulations du génome – doit examiner une proposition de la Saambia (le pays le plus pauvre d'Afrique, une dictature victime de surcroît d'une terrible sécheresse source de famine). Elle est portée par le docteur Ita, célèbre pour avoir inventé le langage de programmation qui rapprocha le codage génétique du codage informatique, le rendant presque aussi simple à réaliser pour peu qu'on dispose du temps de « programmeur » nécessaire. Cette percée valut au docteur Ita, natif du pays et lui-même victime de la famine dans sa famille, son Prix Nobel. Voilà pourquoi on l'écoute, voilà pourquoi il est crédible.

Mais aujourd'hui, Ita ne vient ni demander ni quémander. Il a amené avec lui, devant le CSONU réuni, un enfant saambien de douze ans, Cardo, visiblement bien nourri et en pleine forme physique. Commence alors la démonstration d'Ita : Cardo se nourrit avec grand appétit, devant l'assemblée d'abord médusée puis hostile et enfin furieuse, d'herbe, de feuilles, et d'aiguilles de pin ramassées sur la pelouse à l'entrée du bâtiment. Pour assurer, dit-il, le premier des droits de l'homme qui est celui de survivre, Ita a modifié le génome de l'embryon qui deviendra Cardo pour en faire un humain d'un nouveau genre, capable de tirer sa subsistance d'un grand nombre de nourritures.

Indignation, scandale, fuite d'Ita vers la Sammbia, refus du pays de remettre matériel et cobayes, tout culmine vers une opération militaire internationale, au nom d'un principe de dignité humaine qui implique l'inaltérabilité du génome humain. Mais le génie est sorti de la lampe, il sera difficile de l'y faire retourner.

Rapports Nord/Sud déséquilibrés, morgue des puissances militaires occidentales, posture moralisatrice des mêmes, primauté de la survie, amoralisme de la nécessité, modification de l'homme considérée comme plus efficace que celle de l’environnement, passation de pouvoir géopolitique, le court texte de Liu est aussi brutal que direct.

Il offre une vision relativiste du monde, s'extrayant pour le pire ou le meilleur de la volonté universaliste de l'Occident et proposant une redéfinition contextuelle du droit naturel. On appréciera ou pas selon ses options propres. Le texte de Liu est en tout cas un objet brut – à tous les sens du terme – de SF politique, qui vaut d'être lu comme porte d'entrée dans l'esprit sans fard de l'auteur.

Et, étonnamment, The Old Drift, développe – d'une façon infiniment plus littéraire – certains des thèmes abordés ici. Si ça c'est pas du teaser pour une chronique à venir, je ne sais pas ce que c'est.

The Angel Era, Liu Cixin

Commentaires

Excellent ! J'aime beaucoup quand des textes d'auteurs différents se font echos de cette manière.
Pourrais-tu partager le lien pour télécharger la nouvelle ? J'aimerai beaucoup la lire ;)
Gromovar a dit…
Lien ajouté.

Suffisait de demander ;)