La Maison des soleils - Alastair Reynolds

La Maison des soleils est un roman (de 2008) d’Alastair Reynolds qui arrive enfin en France grâce au Bélial et à l’infatigable traducteur Pierre-Paul Durastanti. La Maison des soleils se passe 6 millions d’années dans l’avenir (énorme à notre échelle, rien à celle de l’univers ; il est important d’avoir ces deux rapports en tête pour comprendre tant la dimension vertigineuse de l'aventure humaine que le caractère transitoire des civilisations présentées ici, aussi éphémères que les nôtres) . La Maison des soleils prenant place dans le même univers que la novella La Millième nuit , publiée en UHL et chroniquée ici, je te renvoie, lecteur, à la chronique précédente dont le début te précisera le contexte. Univers de la Communauté donc. La Lignée Gentiane doit de nouveau se rassembler pour les Retrouvailles au cours desquelles, lors des célébrations des Mille Nuits, vont être partagés les fils mémoriels de chacun des clones (nommés frag, pour fragment de l’initiatrice de la Lignée,

The Test - Sylvain Neuvel


"The Test" est une novella de Sylvain Neuvel qui se passe dans une Angleterre dystopique qu'on peut supposer être celle de l'après Brexit ou d'une période juste un peu plus lointaine dans laquelle la politique d'immigration serait devenue bien plus drastique, prolongement logique des motivations du vote pour le divorce d'avec l'UE.

Idir est un Iranien – dentiste, quarantenaire – qui cherche à devenir citoyen anglais après avoir fui l'autoritarisme de son pays d'origine. Avec lui, sa femme Tidir et de leurs deux enfants. Aujourd'hui est le jour où Idir doit passer le BSA (British Values Assesment), l'examen d'évaluation qui décidera de son avenir : citoyenneté anglaise ou reconduite à la frontière. Il passe le test seul mais ses résultats concerneront toute la famille.

Quelques pages dans la novella, quelques questions écrites de « culture anglaise » auxquelles Idir répond plutôt bien. On a déjà tout loisir de comprendre qu'Idir est un brave homme aimant qui ne demande pas mieux que de s'intégrer paisiblement dans la société anglaise.

C'est alors que des terroristes armés envahissent le centre d'examen, prennent personnel et immigrants en otage, et menacent la police de tuer un otage toutes les quinze minutes si leurs exigences (qu'on ne connaît pas) ne sont pas satisfaites. A l'effroi provoqué par la situation s'ajoute celui d'être choisi par le chef des terroristes comme celui qui devra décider, quatre fois par heure, de qui vit et qui meurt. Commence alors pour Idir un véritable cauchemar moral, encore accentué par la présence de sa famille parmi les otages.

Ce qu'Idris ne sait pas, c'est que...Et bien tu ne le sauras pas non plus, lecteur, je veux te laisser le plaisir de le découvrir – si te venait l'envie de lire "The Test".
Sache seulement qu'Idir ira au bout du désespoir et ne reviendra pas indemne de son voyage en citoyenneté.

"The Test" est une novella énervante.

Plutôt bien écrite, elle place un homme décent face à des dilemmes insoutenables et le lecteur au cœur du conflit intérieur, dans les pensées d'Idir. Aux premières loges donc pour apprécier ce qu'il en est.

Elle utilise un contexte d'anticipation plutôt maîtrisé, même si déjà vu dans de nombreux autres textes.

Elle décrit une bureaucratie tatillonne et peureuse qui cherche avant tout à se protéger et à couvrir ses erreurs. Là aussi c'est déjà vu dans quantité de textes mais ce n'est pas mal fait.

Où est le « Mais » alors ?

"The Test" est un texte trop simple et manichéen car trop ouvertement militant.

Récit :
Idir arrive, il se conduit en brave homme, il commence le test. Les terroristes arrivent, tuent, menacent, effraient, choisissent Idir pour devenir leur Sophie. La prise d'otage avance, les enjeux sont de plus en plus hauts, et la résistance mentale d'Idir est mise à toujours plus rude épreuve.
Mais, en fait, il y a un backstage – et ça je ne le développe pas ici, no spoil.

Décorticage :
Nous avons donc un demandeur d'asile aussi sympathique que droit, une administration froide et sans cœur – forcément –, un traitement policier inhumain – quoi d'autre ? –, une citoyenneté qu'il faut gagner quand d'autres l'ont en naissant – ben, oui –, un prix très élevé à payer pour obtenir le précieux sésame – si élevé qu'Idir en sera marqué à vie.

Malgré une maîtrise certaine de l'écriture, passées les premières pages étonnantes rien n'est surprenant dans le récit tant on comprend ce que Neuvel veut dire. Les quelques concepts de psychologie débités dans le texte ou l'irruption d'Equilibre de Nash ou d'Optimum de Pareto ne suffisent pas à faire de l'ensemble autre chose qu'un exercice militant convenu.
Et que dire du rôle joué par Deep, un membre du service d'immigration qui peut se targuer d'être le premier immigré naturalisé à un tel poste et joue ici le rôle de celui qui ressent de l’empathie mais met un point d'honneur à respecter les règles, prouvant ainsi – dans l'esprit de Neuvel – que les nouveaux citoyens sont toujours bien plus respectueux de celles-ci que ceux qui n'ont pas eu à gagner leur citoyenneté. Tout est cookie-cutter à l'avenant.

Au fil de la lecture je me souvenais d'un grand parmi mes professeurs disant : « on a le droit d'écrire des pamphlets, mais on n'a pas le droit de les faire passer pour des travaux de science politique. » Ici, je me glissait dans sa peau et pensais : « on a le droit d'écrire des tracts No Border, mais on n'a pas le droit de les faire passer pour des novellas d'anticipation. ».

The Test, Sylvain Neuvel

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