Bog People - Hollie Starling

Bog People est une « Working-class anthology of folk horror » , éditée par Hollie Starling.   Working-class anthology car, dixit Starling en préface, les textes rassemblés dans ce volume parlent de cette classe populaire britannique qui est l’objet d’une attention ambivalente de la part des CSP+, dans une société où le système des classes est bien plus évident et prégnant qu’en France. Working-class anthology encore, car dixit toujours Starling, les auteurs réunis ici ont montré patte blanche sur leur appartenance présente ou passée à la classe populaire. Une forme de #OwnVoices donc. Fidèle à l’assertion de Max Weber selon laquelle il n’est pas besoin d’être César pour comprendre César, je suis toujours aussi peu fan de cette approche ; nous verrons bien, rien ne dit que ça nuise.   Folk horror ensuite car c’est du peuple tel qu’en lui-même que veulent nous parler ces textes, de ce peuple britannique qui continue à exister loin de la modernité mo...

Time Was - Ian McDonald


"Time Was", une novella de Ian McDonald, un auteur dont j'apprécie beaucoup la vision. Mais, peut-être pour la première fois, mon avis sur son travail sera ici mitigé.

Vendu ici et là par Tor comme une romance queer à travers le temps, "Time Was" est bien autre chose me semble-t-il.

Ici et maintenant. Emmett est bouquiniste, spécialisé dans les livres sur la guerre. Au déstockage avant liquidation de la boutique d'un confrère il achète un petit recueil de poésie intitulé Time Was. A l'intérieur de l'ouvrage, Emmett trouve la lettre d'un Tom à un Ben, deux soldats britanniques visiblement amants et séparés par la fureur du conflit mondial. Il y est question de parvenir à se retrouver au milieu des vents tumultueux de la Seconde Guerre Mondiale, en dépit des déplacements contraints de l'un et de l'autre.
Emu et touché par ce message qui l'atteint en enjambant les décennies, Emmett se lance dans une enquête sur les traces de Tom et Ben. Qui étaient-ils ? Qu'est-il advenu d'eux ?

A contrario de ce qui est croyable et que suggère l'évidence, Emmett finit par comprendre au fil de ses investigations que, s'il est bien question de déplacements et de séparation dans la correspondance entre les deux hommes, c'est à travers le temps bien plus qu'à travers l'espace que tout ceci a lieu. Tom et Ben sont des voyageurs temporels, clairement involontaires, passant de conflit en conflit – passé et futur – dans une ronde sans fin qui les laisse désemparés et qu'ils tentent de maîtriser par le biais de lettres laissées dans les exemplaires d'un livre, toujours le même, Time Was.

"Time Was" est l'histoire d'une enquête à distance et à travers temps. Elle décrit la passion, alimentée par le mystère, qui saisit un bibliophile contemporain jusqu'à l'obsession. Elle nous parle des livres comme liens matériels intertemporels entre les hommes. Des livres comme supports de communication ou vecteurs de transformation. Elle nous dit aussi sûrement quelque chose d'un amour vraisemblable de l'auteur pour les vieux livres et les bouquinistes qui les conservent et les font circuler. Du regret aussi qu'inspire leur crépuscule.

Le tout – enquête contemporaine et récit à la première personne de la vie de Tom – est émouvant. Les références sont intéressantes – notamment celle aux terrifiants Pals battalions ou aux soldats perdus de Suvla sans oublier la mer en feu de Shingle Street.
Néanmoins, à tête reposé, quelques bémols surgissent.
Les histoires de voyage dans le temps sont toujours délicate à écrire, et celle-ci n'est pas complètement satisfaisante. Le doute laissé à la fin sur l'implication d'Emmett (me) dérange (de ce point de vue, Le jeune homme, la mort, et le temps de Richard Matheson est plus acceptable en n'offrant pas d'explication scientifique). L'explication du tout par le principe d'incertitude ne paraît guère valide au niveau macrophysique.
L'amourette d'Emett n'est guère utile.
Et, pour finir, le jeune homosexuel poète dans la campagne anglaise fait un peu cliché.

Bilan mitigé donc. Peut-être que s'agissant de McDonald les attentes sont trop hautes.

Time Was, Ian McDonald

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