Daredevil Redemption - Hine - Gaydos

Redemption, Alabama. Un enfant du coin est retrouvé tué et mutilé. Après une enquête expéditive le shérif et ses hommes mettent la main sur trois suspects qui font des coupables idéals. Deux garçons et une fille du coin, se disant satanistes tous les trois. Dans le contexte explosif de la mort d’un enfant dans une petite communauté l’affaire est pliée, c’est la chaise électrique qui attend les trois jeunes en dépit de leurs protestations d’innocence. Cette affaire désespérée, pourtant, c’est le brillant Matt Murdoch, plus connu sous le nom de Daredevil, qui la prend en charge en défense de l’accusé principal, sur l’insistance d’une mère sure de l’innocence de son fils. En terrain hostile, l’avocat new-yorkais mettra toute son énergie à disculper son client et à découvrir le vrai coupable. Car, dans une ville où le fanatisme religieux règne et où de sombres secrets obscurcissent la vue, seul l'aveugle qu'il est peut espérer y voir clair. Daredevil Redemption est un one-shot réé

Frankenstein à Bagdad - Ahmed Saadawi - Encore un effort


Il y a des livres qu’on a vraiment envie d’adorer. On est donc un peu désappointé lorsque ce n’est pas complètement le cas. C’est ce qui m’est arrivé avec "Frankenstein à Bagdad".

"Frankenstein à Bagdad" est le troisième roman de l’auteur irakien Ahmed Saadawi. Il a obtenu le prestigieux International Prize for Arabic Fiction en 2014. Et Piranha a, fort judicieusement, décidé de le publier en français.

Bagdad, 2005. Dans une ville dévastée par les contrecoups de l’illégale autant qu’illégitime Troisième Guerre du Golfe, les habitants tentent, littéralement, de survivre. Production et revenus se sont effondrés, une population déjà peu aisée est devenue clairement pauvre. La vie est difficile et précaire, à tous les sens du terme hélas. Car par-delà les difficultés du quotidien, il faut survivre chaque jour aux attentats et aux assassinats politiques ou crapuleux qui gangrènent la ville. L’Etat irakien détruit par le conquérant américain, restent dans la cité, outre des troupes occupation largement cantonnées à la zone verte, des milices religieuses armées, des gangs de délinquants, et des groupes de soldiers of fortune employés par l’un ou l’autre. Sortir dans la rue - pour aller étudier, travailler, voir un ami - c’est risquer de connaitre d’une mort violente. Rester chez soi aussi, certaines voitures piégées étant si chargées d’explosifs qu’elles peuvent faire s’écrouler des immeubles et tuer leurs occupants - on l’a vu encore, hélas, en juillet dernier à Bagdad justement.

C’est dans cette ville en déliquescence que naît le Sans-Nom, Frankenstein moderne autant qu’arabe. Caractéristique de la ville dont il est un atroce reflet, le Sans-Nom est un « monstre » composite.
Il y a d’abord un corps, fait de morceaux de victimes d’attentats cousus ensemble ; ce corps de mongrel, c’est le chiffonier Hadi qui l’a créé patiemment, pour des raisons qui lui appartiennent.
Il y a ensuite l’âme errante du garde de sécurité d’un hôtel, tué dans une attaque à la voiture piégée, qui cherche un sens à l'après-vie.
Il y a enfin une volonté de fer, celle de la « folle » Oum Daniel, qui attend depuis vingt ans, face à un portrait de Saint-Georges à qui elle parle, le retour de son fils Daniel, conscrit disparu au front durant la guerre Iran-Irak.
De la fusion de ces trois misères naît la créature qui se met à arpenter nuitamment les rues de Bagdad.

Et là où le monstre de Mary Shelley n’avait pas de bût bien clair, celui de Saadawi, lui, veut venger ceux qui le constituent en tuant leurs assassins. Il finira par comprendre que chaque nouvelle mort fait de nouvelles victimes à venger, que le cycle de la vengeance est sans fin, et que personne n’est parfaitement innocent, tout dépend du niveau auquel on décide d’arrêter la recherche des causes premières. Les péchés des fils sont-ils imputables aux pères, et aux pères de leurs pères ? Oui, au moins dans la mesure où leur simple existence dans un passé révolu est la condition première sans laquelle il n’y aurait pas eu, un matin de 2005, un individu précis, au volant d’un camion bourré d’explosifs jusqu’à la gueule, dont l’acte suicidaire tue un jeune garde et met par là même en branle la chaîne d’événements décrite dans le roman.

Luttant contre ce Sans-Nom qui finit par terroriser même la mithridatisée Bagdad, une étrange brigade de Surveillance et d’Intervention, proche tant du gouvernement provisoire que des Américains et commandée par le baasiste non débaasisé Majid Sourour, emploie des nervis et des astrologues avec des résultats modestes.
Cherchant à raconter son histoire, le jeune journaliste Mahmoud al-Sawadi, ambitieux et amoureux, dans cet ordre.
Et puis, tout le petit monde du quartier Batawin, épicentre de l’affaire, avec leurs relations, leurs inimitiés, leurs ambitions - si modestes soient-elles.
Dans une ville qui s’effondre, que restera-t-il de ces gens et de leurs vies après que le monstre ait ajouté du chaos au chaos ?

J’avais vraiment très envie d’aimer ce livre repéré il y a des mois. Car c’est un sujet d’histoire contemporaine important. Car le terrorisme aveugle justifié religieusement arrive ici. Car c’est une histoire de voitures piégées et que l’actualité de la semaine montre que, contrairement à ce que j'avais toujours cru, je ne suis plus à l’abri de cette menace ici.
Et Saadawi -rendons-le lui - fait en partie le job. On voit la folie d’une ville qui connait plusieurs explosions par jour. On voit la résilience résignée d’une population qui doit vivre quand même (même si à la fin beaucoup sont morts ou ont fui). On voit les politiciens qui, lorsqu’ils parviennent à survivre, profitent du chaos pour s’enrichir. On voit la corruption et les détournements. On voit la superstition d’une population que le rationalisme n’a fait qu’effleurer. On voit la mosaïque confessionnelle, qui fonctionnait à peu près avant la désastreuse invasion américaine et beaucoup moins après.

Où est donc le problème alors ?

Je trouve au roman deux défauts.

D’une part, l’univers décrit fait parfois un peu Don Camillo. La petite vie du petit quartier, c’est un peu le petit bout de la lorgnette quand même, d’autant que le ton rappelle parfois les films de Duvivier, jusqu’à la « folle » qui voit Saint-Georges lui parler.

D’autre part, et c'est plus ennuyeux, le style du roman est vraiment trop plat, trop propret. Descriptif au point d’être empesé, il n’est jamais excitant, jamais exaltant, provoque régulièrement des moments d’ennui alors que le fond ne devrait pas y prêter. La narration à la troisième personne, souvent au style indirect, qui passe d’un point de vue à un autre sans se centrer sur aucun, et d’un moment à un autre dans de dérangeants gimmicks de temporalité, ne sert pas le texte (texte original ou traduction, j’ignore ce qui coince). Le problème est mis en exergue à la lecture du chapitre X, dans lequel le Sans-Nom se raconte. Là, à la première personne, en mode autobiographique, la lecture devient passionnante. Il aurait fallu que ce ton fut celui du roman entier.

Si c'est l’intention qui compte, le roman est une réussite, si on juge aussi la réalisation, pas tout à fait.

Frankenstein à Bagdad, Ahmed Saadawi

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