Eric LaRocca - As-tu mérité tes yeux ?

Agnes Petrella est une jeune américaine un peu dans la dèche. Elle est lesbienne aussi, ce qui ne change pas grand chose à l'histoire au début alors que « dans la dèche » en est le point de départ. En ce 26 mai 2000, Agnes, qui a besoin de 250$ pour payer son loyer du mois, poste sur un forum queer une annonce pour mettre en vente un épluche-pomme vieux de plus d'un siècle. Contrairement à ce qui se pratique habituellement, elle a composé pour ce faire un message de presque quatre pages dans lequel elle explique avec force détails à quel point cet épluche-pomme est un élément important de son histoire familiale et donc à quel point aussi il lui est pénible de s'en séparer. Nécessité faisant loi elle s'y est finalement décidée mais, dit-elle, elle ne consentira à vendre l'objet qu'à un collectionneur sérieux (!). Deux jours plus tard, après quelques réponses insultantes, Agnes en reçoit une intéressante d'une certaine Zoe Cross qui dit être intéressée et prêt...

Retour de chronique : Chroniques de la Grande Séparation, Gabriel Eugène Kopp

Retour de chronique publiée dans Bifrost 72


Fut un temps, G.-J. Arnaud écrivit ses Chroniques de la Grande Séparation, publiées au Fleuve Noir. Rien à voir avec celles-ci qui sont « l’œuvre » de Gabriel Eugène Kopp.

Prologue : on nous montre quatre colons galactiques perdus qui récréent en un siècle une population viable et une civilisation, dans un recommencement accéléré qui évoque autant l’Ouroboros qu’une boite de Petri avant de se conclure en Planète des Singes.
Ouch !
La suite nous décrira l’aventure spatiale qui a conduit ces explorateurs à devenir des naufragés et à se changer en Adam à trois Eve. Kopp nous explique donc pendant une centaine de pages comment l’Humanité, ayant admis l’impossibilité de la vitesse supraluminique ainsi que celle des vaisseaux arches, a développé une technique basée sur un « repliement (plus ou moins) de l’espace ». Il détaille les expériences, les échecs , les raffinements progressifs du concept et de la technique, jusqu’à la colonisation d’une bonne partie de la galaxie par l’espèce humaine, conduisant à l’abandon progressif de la Terre et à sa régénération écologique subséquente.

Pourquoi pas ? Mais, comme pourrait l’écrire Kopp, il y a maldonne.

En 1996, le physicien Alan Sokal réussit à publier un article de sciences sociales, que lui savait pastiche, dans la prestigieuse revue « Social Text ». Pompeusement intitulé « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformatrice de la gravitation quantique », Sokal y prouvait par l’exemple qu’il était possible de paraître brillant et post-moderne, jusqu’à leurrer un comité de lecture, en utilisant à l’emporte-pièce des concepts et des termes scientifiques durs mal compris et mal utilisés. Cet article fit ensuite l’objet d’une développement en France avec le livre « Impostures intellectuelles », écrit par Sokal et Bricmont.

Avec "Chroniques de la grande Séparation", Kopp renverse la proposition. Il est un poète qui « écrit » une novella de SF voire de Hard-SF. Il le revendique en postface comme une blague, celle d’un « imposteur guilleret » ou d’un « farceur ». Problème : Kopp n’est jamais convaincant, jamais drôle, en plus d’être atrocement franchouillard.
Dans son texte, il n’y a aucun personnage qui dépasse le statut générique d’un pion de Monopoly, et aucune prospective ni réflexion intéressante sur les conséquences de l’évolution technique. Dans le but d’être « guilleret », je suppose, il offre au lecteur quelques vannes de bien piètre qualité et une bonne grosse rigolade sur des problèmes de pipi caca (ça fait toujours rigoler). De plus, mais là j’ignore s’il y a un but, il utilise régulièrement un vocabulaire argotique que n’aurait pas renié André Pousse, « bourrin », « piaf », « zozios », « on rase gratis » etc. Sans compter une déformation transparente de Galilée.
Quant à son « imposture SF », les néologismes et concepts qu’il invente rendent juste la lecture pénible, tant il accumule les mots boursouflés qui, peut-être, le font rire, mais donnent uniquement au lecteur l’impression très justifiée de perdre son temps sans rien comprendre. Qu’on me permette d’écrire que ce ne sont que billevesées et calembredaines hypnagogiques et superfétatoires. Y a-t-il des lecteurs qui peuvent consacrer 9,50€ et 1 heure 30 de leur vie à lire ça et en sortir satisfait ? J’en doute.

Chroniques de la Grande Séparation, Gabriel Eugène Kopp

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