Esperance - Adam Oyebanji

Chicago, Maintenant. Le détective Ethan Krol, du Chicago P.D., est appelé sur une très étrange scène de crime. Sur le sol d'un luxueux appartement de la ville, au 20ème étage, se trouvent étendus trois cadavres : un homme originaire du Nigeria, un bébé, et un...barracuda. Dans la chambre adjacente, une femme est inconsciente, la compagne et mère des deux victimes. Elle l'ignore encore mais elle n'a plus, de fait, ni compagnon ni enfant. Aucun signe de violence sur les deux morts, juste un peu d'eau autour de leur corps. La femme est impossible à réveiller. Et il y a aussi la question du barracuda. Ce qui était une improbable scène de crime devient un véritable mystère quand l'autopsie montre que les deux morts de sexe masculin (père et fils) ont été noyés dans de l'eau de mer (Chicago est à un bon millier de kilomètres de l'océan le plus proche) et que les analyses toxicologiques révèlent que la femme, qui finit par se réveiller, a été endormie par une neu...

S'endormir d'ennui


Dans "Grimscribe", recueil d’une partie des premières nouvelles de Thomas Ligotti, il y a "The Last Feast of Harlequin", nouvelle dédiée à HPL et dont T.S. Joshi a dit que c’était le meilleur hommage à Lovecraft jamais écrit. Je ne sais pas si j’irai jusque là, mais il est clair que la nouvelle est lovecraftienne et qu’elle réussit à rendre de manière convaincante l’atmosphère si particulière des récits du Maitre de Providence. Héros universitaire, ville décadente et mystérieuse, mentor emporté par ses propres recherches, lieu de culte souterrain dans lequel se révèle l’animalité humaine, les thèmes comme le ton sont familiers au lecteur d’HPL. L’hommage est réussi ; la mission remplie.

Puis il y a le reste. Et c’est moins brillant.

Des 12 nouvelles suivantes on peut dire qu’elles sont obsessionnelles. Ecrites à la première personne, revenant inlassablement sur les mêmes thèmes, elles lassent rapidement, à quelques exceptions près que je citerai après. Trop brèves, elles ne sont porteuses d’aucune progression dramatique et se révèlent bien incapables de susciter la moindre tension ; regrettable pour des récits d’horreur fantastique. D’un style chargé au point d’être obèse, les nouvelles ne font que ressasser la croyance monomaniaque de Ligotti, guère différente de celle de Lovecraft : la réalité n’est qu’une illusion qui dissimule l’horreur d’un chaos cosmique où l’être humain n’a ni place ni poids, et ceux qui lèvent le voile découvrent à quel point tout ce qu’ils tenaient pour vrai était mensonge, mensonge salvateur néanmoins sans lequel il serait impossible de conserver sa santé mentale.

Le problème c’est que les récits sont très pauvres en développement. Quelqu’un découvre la Vérité, ou la lit, ou on la lui dit. Il voit alors le chaos et en est transformé, physiquement ou intellectuellement. Fin. 12 fois. Sous diverses formes.

Interminables et récurrentes, les descriptions d’une intrusion du chaos primordial dans le réel sont, de plus, si soudaines que le voile de la réalité y est percé sans transition, aussi brusquement qu’un cheveu tombant dans la soupe.

Reviennent sans cesse l’obscurité, le chaos multicolore, les quartiers en déliquescence, l’entrée dans des maisons, ou la montée au dernier étage, ou la descente dans le sous-sol, etc. Le tout atrocement statique. Des personnages qui bougent peu, décrits à l’aide d’un style tellement lourd qu’il leur ôte la moindre énergie. En fait d’horreur cosmique, j’ai littéralement failli m’endormir à plusieurs reprises.
Dans ce mortel ennui surnagent les quelques récits à chute, un peu plus dynamiques et qui ont le mérité de surprendre. Citons donc comme lisibles The dreaming in Nortown, The cocoons (celle-là n’est vraiment pas mauvaise), et la très cruelle The library of Byzantium.

Grimscribe, Thomas Ligotti

Commentaires

Raphaël a dit…
Eh bien, il est rare d'entendre du mal des nouvelles de Ligotti. Et d'ailleurs l'homme a tellement bonne réputation que j'ai acheté l'intégrale de ses nouvelles en anglais (malgré mon niveau médiocre dans cette langue) ; j'en ai lu quelques-unes en les trouvant toutes plus ou moins surannées, sans beaucoup de modernité dans l'approche narrative ou les thèmes.

Néanmoins, j'attends l'anthologie que devrait publier Dystopia dans quelques temps pour me faire une opinion plus précise de Ligotti.

En tout cas, encore une fois, un bel article.
Gromovar a dit…
Je sais bien, mais j'ai vraiment failli m'endormir d'ennui.

Et merci encore