La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

Ghost in the machine



"Jardins virtuels" est un recueil de Sylvie Denis regroupant des nouvelles publiées il y a plus de dix ans et c’est un bien bon ouvrage. Je remercie Efelle qui m’a donné envie de lire ce petit livre.
Sylvie Denis, c’est un peu Greg Egan qui serait tombé dans la marmite du Golden Age. Ses nouvelles développent l’effet des nouvelles technologies sur l’humanité, dans une optique qui est souvent transhumaniste. En cela elle est proche d’Egan, mais contrairement à lui, elle n’oublie pas de donner des sentiments humains à ses personnages. Clonage, IAs, intrication homme machine, robots prenant leur indépendance, les thèmes sont technologiques, mais l’auteur prend soin de donner un sens politique aux histoires qu’elle raconte, et des motivations humaines à ses personnages, en particulier un amour de la liberté qui justifie de prendre des risques physiques. Enfin, elle utilise des éléments de contexte qui m’ont souvent furieusement fait penser au Golden Age par leur prosaïsme.
Dans les textes de Sylvie Denis, une humanité dépassant ses limites biologiques se divise souvent en factions indifférentes ou opposées, regroupées autour d’idées simplistes dans la cadre d’organisations autoritaires. Des individus tentent de résister ou de se libérer, découvrant parfois qu’il est plus noble de rester pour résister que de fuir. Au dilemme « Exit » ou « Voice » d’Hirschmann, Denis répond sans hésiter « Voice », et même quand le tyran est diffus, résister est toujours une bonne idée. Les histoires racontées sont de bonne facture, et ces textes se lisent avec plaisir sans oublier de titiller l’intellect.
On trouvera donc dans ces pages,  entre autres choses, les très bons « Dedans, dehors », prix Rosny Aîné 2010, nouvelle sur un intégrisme religieux autoritaire miné par la résistance d’une jeune fille et d’un homme qu’ont aurait pu croire absolument impuissant ; « L’anniversaire de Caroline », prix Solaris 98, dans lequel une femme condamnée à une peine atroce trouve un moyen de s’évader virtuellement et de reprendre un peu de contrôle sur le monde ; « Fonte des glaces », où le militantisme est porté par l’émotion du souvenir ; « Cap Tchernobyl », un texte triste dans lequel des robots en quête d’un lieu pour vivre libres choisissent Tchernobyl, lieu ultime de l’absence humaine ; « La balade du singe seul », amusant, politique, sans doute trop foisonnant dans sa thématique ; « Si Thébaldus rêve… », description d’un lieu élitiste et clivant, un peu trop foisonnant aussi peut-être ; « De Dimbour à Lapêtre », très originale histoire de clone et de sous-groupe humain, développant l’idée suivant laquelle les choix de vie des uns entrainent la désapprobation des autres ; « Magma-Plasma », texte plaisant d’un classicisme achevé (avec habitat martien and so on…) mis à part les dernières pages résolument biotech ; « Paradigme Party », dont j’ai déjà dit tout le bien que je pensais ici ; et « Nirvana, mode d’emploi », texte beau, poignant, sur l’exploration et la modification de la mémoire. Il n’y a donc que deux ou trois nouvelles plus anecdotiques, ce qui est très peu.
Dans ce recueil hautement recommandable, Sylvie Denis livre une SF politique au sens profond du terme, intelligente et sensible, modérée et engagée, ce qui fait déjà pas mal de quadratures du cercle résolues dans un seul ouvrage.
Jardins virtuels, Sylvie Denis
CITRIQ

Commentaires

Anudar a dit…
Ouh, que tu m'intéresses...
Lorhkan a dit…
Mmmmh, tentant, très tentant !
Du Egan avec des sentiments, exactement ce que je cherche, le froideur de ce dernier me gênant beaucoup...
Guillmot a dit…
Tu es mûr pour Pèlerinage de chez ActuSF, si c'est pas déjà fait.
Efelle a dit…
Content qu'il t'ait plu.

Merci pour le rappel Guillaume, ce recueil m'avait échappé.
Gromovar a dit…
J'irai voir Pélerinage mais il faut que je descende un peu ma pile d'abord.
Lhisbei a dit…
Il va remonter dans ma PAL celui-là ^^
Tigger Lilly a dit…
Je l'ai lu y a des années, j'étais tombée dessus, en super bonne état dans un magasin de seconde main. Je ne me souviens plus des nouvelles mais par contre bien que j'avais apprécié ma lecture. Je le relirai un jour.
Vert a dit…
Et bah, moi qui lorgnais déjà dessus, je vais le guetter en magasin ou en bibliothèque maintenant ^^
Gromovar a dit…
N'hésite pas :)