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Robopocalypse" est un roman post-ap singularitiste décrivant la guerre menée, contre les humains, par une IA en colère, la quasi extermination de la race humaine, puis, quand tout semble perdu, le développement (!) de la résistance, culminant dans la destruction de l’ennemi informatique. Et, disons le tout net, globalement c’est pas fameux.
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Robopocalypse" est de ces rares romans qui illustrent un fond de piètre qualité par une forme médiocre.
Voyons d’abord, brièvement, le fond. "
Robopocalypse" raconte donc comment une IA rebelle décime l’humanité en utilisant une armée de robots, d’abord nos robots domestiques (l’action se situe à quelques années d’ici), puis des robots spécialisés qu’elle crée ou développe à partir de modèles militaires existants. Telle
Skynet, l’IA est brillantissime, voit tout, contrôle tout. Elle pourrait sans difficulté anéantir l’Humanité en utilisant des armes nucléaires. Mais elle ne le fait pas car, si elle n’aime guère les humains, elle aime la vie. A peine sentiente et déjà écologiste, serait-ce un signe d’intelligence supérieure ? Donc, anéantissant l’Humanité à la bonne franquette, à l’aide de voitures servo-controllées, de poupées qui pleurent, et de robots boniches, elle en rate. Et les humains c’est comme les poux, s’il en reste, ils se multiplient. Et ils se vengeront. Quelle erreur stratégique ! Les résistants se cachent en particulier dans une réserve indienne où on ne viendra guère les déranger, et où ils pourront reconfigurer des robots de combat à l’aide de leurs petites mains et des quelques outils disponibles (mais c’est off, donc ils disposent peut-être d’un labo de physique enterré sous les tipis ; l’un des personnages ne dit-il pas d’ailleurs « un mécanicien, c’est un ingénieur en jean ». Dont acte.). Autre élément amusant, Archos, l’IA
gone rogue, se serait démultipliée et dématérialisée sur le réseau dans un vrai monde informatique, à fortiori dans le futur. Mais ce n’est pas ce qu’elle fait. Elle va s’enterrer dans une seule UC dans une caverne sous la glace en Alaska, comme Fu-Manchu ou le Dr No (on dirait que j’en rajoute mais même pas). Du coup, pour la détruire, on y va physiquement (à pied d’ailleurs, ceux qui connaissent l’Alaska apprécieront), et, dans une scène qui est un véritable
climax (j'rigole), on la détruit en bombardant de rochers son UC. Mouarf ! Le
cloud computing n’avait pas du encore être inventé. En revanche, Internet ou ce qui en tient lieu fonctionne encore et n’est pas contrôlé par l’IA diabolique (étrange). On le sait parce qu’à un moment, un peu avant, un robot trafiqué par un vieux japonais devient sentient (et oui !) et fait une espèce de maraboutage qui rend sentients tous les autres robots humanoïdes de la Terre. Aucun problème de communication, ni de ressources processeurs, ni de taille mémoire. Pouf ! Abracadabra ! Les humanos sont tous sentients. Et que font-ils de leur sentience toute neuve ? Ils décident qu’Archos est méchant, et qu’ils vont devenir les amis des humains et les aider à le vaincre. Devant un tel message d’universalisme, d’antispécisme, et de tolérance, j’ai failli pleurer de bonheur. J’arrête là pour le fond.
Sur la forme, "
Robopocalypse" ne peut emporter l’adhésion. Présent de narration permanent qui donne une impression de litanie sans aucun relief émotionnel ou dramatique. Dialogues brefs, rares, et surtout informatifs. Utilisation extensive du mot « Héros ». Lieux creux (New York, camps de travail, camp indien, rien n’est jamais développé), monde absent, ou quasiment (un narrateur dit d’ailleurs : « Grâce aux uniformes nous comprenons qu’ils sont principalement Chinois et Russes. Quelques Européens de l’Est…Ces corps oubliés me rappellent à quel point nous connaissons peu la vision d’ensemble. Nous ne les avons jamais rencontrés, mais une autre armée humaine a combattu et est morte ici »). Victoire éclair de type « on attend, on marche, on finit par arriver, on tue le bad guy, on a gagné ». Jusqu’à la conclusion attendue, l’histoire de la « Guerre » consiste en une succession de saynètes censées représenter des points d’inflexion dans les évènements, mais durant lesquelles il ne se passe jamais rien de spectaculaire. On peut penser à
World War Z, mais là où Brooks réussit à donner de l’ampleur et de l’intensité à son récit, Wilson y échoue. La manière dont Wilson traite "
Robopocalypse" en fait un chapelet de scènes limitées, sans décor et sans grand intérêt, bien loin du Cinémascope mondial de Brooks.
Exceptionnellement j’ai beaucoup spoilé, mais c’est volontaire. C’est pour vous éviter de lire ce mauvais livre. Les droits ont été achetés par Spielberg, je crois. Ca ne m'étonne pas, c'est largement assez con pour être adapté en film d'action.
Robopocalypse, Daniel H. WilsonL'avis de Cédric JeanneretLu dans le cadre du
Challenge Fins du Monde de Tigger Lilly
Commentaires
Je suppute que le fait de l'écouter en livre audio plutôt qu'en lecture a sans doute gommé certains défauts lors de ma "lecture"
J'imagine aussi qu'à l'écoute les défauts de style s'estompent.
Quand je vois certaines critiques de la presse US je me dis que vraiment ya des journalistes qui vont à la bonne soussoupe.
@ Cédric : You're welcome.
J'ai préféré éviter ;-)