Gotham Central t3 - Brubaker - Rucka et al.

Juste un mot pour dire que vient de sortir le tome 3 de la série Gotham Central chez Urban Nomad. Je ne reviens pas sur les caractéristiques et qualités de la série. On les trouvera dans  ma chronique des deux premiers volumes . Elles sont  toujours aussi présentes dans ce troisième et avant-dernier tome. Je viens juste t’allécher, lecteur, avec le sommaire de cet opus. On commence avec Corrigan , une histoire assez courte dans laquelle l’inspectrice Montoya se salit les mains pour impliquer un agent ripou de l’identité judiciaire qui a mis en difficulté son équipier, Crispus Allen, en soustrayant une preuve capitale après une fusillade. Côté famille en revanche, depuis son outing, rien ne s’est arrangé. Quand on a des parents latinos très religieux, ça ne passe pas. Suit Extinction des feux , dans lequel la police de Gotham, représentée ici par le commissaire Akins, rompt définitivement et de manière très visuelle le lien ténu qui la liait à Batman. Une décision qui ne fait ...

Gnome de Zurich


Flore Vasseur est une diplomée IEP/HEC qui a vécu à New-York la folie de la bulle Internet, puis a tout plaqué pour se promener dans le monde avant de créer un cabinet de consulting. Elle a écrit "Une fille dans la ville", une autobiographie, puis maintenant "Comment j'ai liquidé le siècle", fable morale sur un trader qui s'engage dans la destruction du système financier mondial. Ce roman est une perle.
Décrivant un milieu qu'elle connait parfaitement, Flore Vasseur place le lecteur dans la tête d'un trader de très haut niveau, lui permettant de voir ce qu'il voit, d'entendre ce qu'il entend, et de savoir ce qu'il pense. Et c'est édifiant.
Pierre est le trader-type. Fils d'un petit artisan de Clermont-Ferrand, matheux compulsif et donc adolescent inadapté à la vie sociale, il fait Polytechnique et devient trader dans une grande banque. Il a 25 ans, une compétence relationnelle nulle, et un salaire à 7 chiffres. Sa vie se partage entre un travail quotidien de 18 heures et une vie de nabab. Flore Vasseur passe tout en revue sans rien omettre : la morgue des traders (des "X" qui considèrent les Enarques comme des buses, et les diplomés d'école de commerce comme des zéros), leur nombreux petit personnel, leurs lofts somptueux remplis d'oeuvres d'art et de jouets d'enfants à 15000$, leurs multiples voitures de sport, leur consommation de produits hors de prix markétés et vendus par des petits futés qui savent où trouver les vaches à lait, leur mépris pour tout ce qui n'est pas leur caste, leur irresponsabilité morale, leurs mariages ratés, forcément ratés, leurs enfants malheureux, leurs parents oubliés, leur sexualité faite de prostituées de luxe et de filles ambitieuses, leurs coachs périnéaux, l'absence d'attache de ceux qui sont peut-être les seuls vrais apatrides. Le petit monde des traders constitue une aristocratie qui a tous les traits et les travers de celle d'Ancien Régime, en particulier son caractère parasitaire et souvent obscène. Tout ceci pourrait paraitre bien sinistre à lire. Mais le grand talent de Flore Vasseur est de brosser ce tableau avec un cynisme, un ton caustique et décapant qui rend souvent le roman hilarant (le couple de Pierre raconté en 5 pages de la rencontre au divorce est un petit bijou). Il faudra aimer l'humour noir pour apprécier ; j'ai adoré.
Il y a quelques années j'avais lu le très pénible "Horreur économique" de Viviane Forrester. Ce que décrit Flore Vasseur n'en est pas très éloigné, mais là où le Forrester était une purge, le Vasseur est un grand moment de plaisir. Là où l'hystérie incantatoire de Forrester rendait les grands capitalistes presque sympathiques, Vasseur livre au lecteur le portrait d'une classe dont le monde ferait bien de se débarasser.
Mis à part un peu de conspirationnisme (je ne suis pas très fan) et deux ou trois dernières pages un peu surréalistes, "Comment j'ai liquidé le siècle" est un roman jubilatoire que j'ai dévoré en deux soirées et que je conseille vivement à tous ceux qui veulent pouvoir expliquer pourquoi ils n'aiment pas les financiers.
Comment j'ai liquidé le siècle, Flore Vasseur

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