Descente - Iain Banks in Bifrost 114

Dans le Bifrost 114 , on trouve un édito dans lequel Olivier Girard – aka THE BOSS – rappelle que, en SF comme ailleurs, un part et un autre arrive. Nécrologies et anniversaires mêlés. Il y rappelle fort justement et pour notre plus grand plaisir que, vainquant le criminel effet de génération, Michael Moorcock et Big Bob Silverberg – les Iguanes de l’Imaginaire – tiennent toujours la rampe. Long live Mike and Bob !! Suivent les rubriques habituelles organisées en actualité et dossier : nouvelles, cahier critique, interview, biographie, analyses, bibliographie exhaustive, philofiction en lieu et place de scientifiction (Roland Lehoucq cédant sa place à Alice Carabédian) . C'est de Iain Banks qu'il est question dans le dossier de ce numéro, on y apprendra que la Culture n’est pas seulement « ce qui reste quand on a tout oublié ». Dans le Bifrost 114 on pourra lire une jolie nouvelle de Iain Banks, intitulée Descente et située dans l’univers de la Culture (il y a des Orbitales)

Big stick


"La paille dans l'oeil de Dieu" décrit la première rencontre entre une civilisation humaine spatiale et une race extra-terrestre intelligente et technicienne. Qu'on ne s'arrête pas au thème space-op déjà traité plusieurs fois ! Ce roman est une superbe étude de cas de realpolitik. Par delà l'excitation de la rencontre et de la découverte, les représentants militaires puis politiques de l'Empire doivent assurer la sécurité de la race humaine, y compris en prenant des mesures strictement pragmatiques et dépourvues de tout idéalisme. Confrontés à une altérité radicale les humains doivent d'abord ne faire aucune fausse maneuvre (un des personnages dit qu'il va devoir jongler avec des oeufs de grande valeur en faible gravité). Le livre manie parfaitement les questions de nécessité, de sacrifice nécessaire, d'indispensable réduction de l'incertitude. Il montre comment gouverner c'est se préparer éternellement à tout, y compris au plus imprévisible, et prendre par avance les mesures appropriées. Il oppose de manière magistrale l'éthique de conviction des savants à l'éthique de responsabilité des politiques. Et il le fait d'une manière riche et novatrice en insistant sur trois points. Tout d'abord il met en scène des personnages de politiques ou militaires qui ne sont pas des bêtes sauvages ou inhumaines ; ils ont des doutes mais ils suivent toutes les voies, y compris les moins probables, jusqu'à leurs conclusions extrêmes, dans l'optique de limitation des risques qui est leur préoccupation unique (c'est ce que nous faisons aussi quand nous stockons des millions de dose de Tamiflu en prévision d'une hypothétique pandémie aviaire). Puis il montre que l'"Autre" a aussi des intérêts et des priorités. L'"Autre" pratique aussi la realpolitik. Il n'y a pas les méchants "nous" face aux gentils "eux". Leur intelligence, comme la nôtre, les pousse à la prudence et à choisir la meilleure solution disponible, même si celle-ci n'est pas absolument satisfaisante. L'"Autre" ment comme nous, il a des intérêtes propres comme nous, il cherche des alliances comme nous, y compris en divisant l'adversaire. L'"Autre" n'est ni la brute abrutie de "La guerre éternelle", ni un E.T. au long doigt aussi amical que celui de Dieu dans la chapelle sixtine. L'"Autre" est simplement intelligent, avec tout ce que ça implique. Enfin le roman montre magnifiquement comment la méfiance réciproque conduit à des pertes de temps et des solutions sous-optimales ; mais à ceux qui me diront que ça signifie qu'il vaudrait mieux être confiant et amical, je rétorquerai que la théorie des jeux a malheureusement prouvé le contraire.
Malgré quelques éléments qui font un peu vieille SF (le mariage en particulier est assez surréaliste, ou l'alambic à whisky), "La paille dans l'oeil de Dieu" est un grand livre qu'il faudrait faire lire à tous les étudiants en géopolitique. Tiens, puisqu'on en parle, plus je pense au livre, plus je pense au conflit israélo-palestinien (y compris pour des raisons que je ne peux donnner ici sous peine de spoiler).
La paille dans l'oeil de Dieu, Larry Niven et Jerry Pournelle

Commentaires

Anonyme a dit…
Bien d'accord, j'avais beaucoup aimé aussi. Et effectivement, sur le plan des relations internationales, c'est sacrément bien foutu. Un très bon livre de SF. Space op' certes, avec des militaires dedans certes, mais vraiment pas con pour autant ; et ça fait du bien !
Gromovar a dit…
Tout à fait :-)
Anonyme a dit…
J'avais aussi été très agréablement surpris. Un excellent roman bien conçu.