Horizons obliques - Richard Blake

Sortie demain de Horizons obliques , un one-shot SF de Richard Blake. Il y a des années que Jacob et Elena Armlen se sont perdus dans une dimension parallèle qu'ils tentaient de cartographier. Depuis aussi longtemps Adley, leur fille, veut les retrouver. Après un long entrainement elle part donc en quête de parents depuis trop longtemps absents, à travers des mondes incroyables, avec l'aide de ses grands-parents, d'un impressionnant appareillage technologique de voyage transdimensionnel, de ses dons de prescience, et d'un robot humanoïde nommé Staden. Si le scénario, plutôt contemplatif, pourra désarçonner certains lecteurs, on ne peut qu'être impressionné par la beauté envoutante des planches réalisées intégralement par un auteur qui est peintre avant d'être bédéaste (et dont c'est le premier album) . Dès la première page représentant un rêve d'Adley portant un ours polaire sur son dos on est saisi par le style et la qualité graphique de l'album. L&

Uncanny Valley - Greg Egan - Je est un autre


Futur proche. Adam s'éveille. D'où ? De quoi ? On ne le saura pas dès l'abord.
Ce qu'on comprend immédiatement, en revanche, c'est qu'Adam a eu une relation particulière avec un "vieil homme" dont les funérailles ouvrent la nouvelle. A cette cérémonie à laquelle il ne se rend qu'avec inquiétude, Adam ne semble pas vraiment le bienvenu. Je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler. Qu'on sache seulement qu'Adam se lancera ensuite dans une quête impérative du "vieil homme".

Avec "Uncanny Valley", Greg Egan livre au lecteur une réflexion intéressante sur l'identité. Que sommes-nous de plus que la collection – consciente et inconsciente – de nos souvenirs ? Changer la mémoire, est-ce changer l'individu ? Le "Moi", comme chez les Ents, peut-il être autre chose que la somme de l'expérience accumulée ?
Descendant le fil de pensée, on se demande alors si l'amputation mémorielle est une mutilation, une chance d'approcher le bonheur en effaçant le pire pour ne garder que le meilleur, ou une occasion de se redéfinir en se débarrassant des oripeaux des expériences accumulées ?
Un questionnement sur l'identité dont Adam ne peut faire l'économie, et auquel Ted Chiang s'était attaqué dans The Truth of Fact, the Truth of Feeling, d'une manière bien moins émouvante.

Mais ici, Egan, toujours foisonnant, fait bien plus en retournant le point de vue sur l'uncanny valley et en interrogeant sur l'existence entre deux statuts – c'est à dire hors de tout statut. Il pose ici des questions inédites qui se poseront dans un avenir proche – que posait par exemple Bacigalupi dans Mika Model – mais qui se posent déjà ici aussi pour tous ceux qui vivent dans l'insécurité statutaire, les sans-papiers non-expulsables/non-régularisables ou les enfants conçus à l'étranger par GPA, entre autres (de ce point de vue, la sécurité juridique et patrimoniale de Choupette, la chatte de Karl Lagerfeld, est plus assurée).

Comme toujours, l'auteur australien a plusieurs fers au feu. Comme toujours il stimule son lecteur. Comme tout vrai auteur de SF il interroge l'avenir sans négliger le présent (même s'il se défend de toute écriture à clefs).
Ici il parvient – ce n'est pas toujours le cas – à donner chair à ses personnages et à les rendre attachants, tant dans leur désarroi que dans l'amour intense qui les anime ou la noblesse d'âme dont ils font preuve.

Les anglos peuvent trouver la nouvelle ici. Les autres pourront la lire, traduite, dans le Bifrost 88 – personne ne le croira mais cette collision est accidentelle et non publicitaire.

Uncanny Valley, Greg Egan

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