La Dissonance - Shaun Hamill

2019, quatre adultes qui furent jeunes et le sont moins maintenant sont invités à une commémoration dans leur ancien lycée de Clegg, une petite ville du Texas. Les vies actuelles des quatre anciens élèves, qui ne se sont pas revus depuis des années (et auquel s'ajoutera un cinquième protagoniste involontaire, Owen, encore adolescent) , illustrent, hélas pour eux, diverses formes de l'échec professionnel, sentimental et social. On comprend vite qu'une partie de l'explication à ces vies insatisfaisantes se trouve dans des événements tragiques survenus à la fin des années 90 alors que les « héros » (ce n'est pas le mot juste) du roman était encore scolarisés au lycée de Clegg. Et que de vieilles histoires sont encore à régler. La Dissonance est le second roman de Shaun Hamill qui avait offert au lectorat le très réussi Une Cosmologie de monstres . C'est une friandise pour nostalgiques de bike stories des 80's (même si ici, âge aidant, c'est en voiture qu...

Golden State - Ben H. Winters - Retour de Bifrost 103


Futur indéterminé. Californie – ou, selon sa nouvelle dénomination Golden State. Un événement cataclysmique s'est produit dans un passé indéterminé à l'issue duquel la Californie est devenue le Golden State avant de se couper du reste du monde. Le paradis sur Terre qu'est le Golden State est un Etat fondé sur le culte de la vérité. Aucun mensonge n'est toléré, la réalité s'appuie sans cesse sur un ensemble de vérités incontestables.

Celles que les citoyens énoncent entre eux dès qu'il s'agit d'initier une conversation (« Dix est la moitié de vingt ; mais c'est aussi deux fois cinq ; ainsi en a-t-il toujours été ; qu'il en soit toujours ainsi », par exemple).

Celles que filment toujours et partout les innombrables « captures » – caméras de surveillance qui archivent tout ce qu'elles enregistrent dans le Registre central.

Celles que chaque citoyen écrit sur son Carnet de jour à fin de stockage futur dans le dit Registre. 

Celles enfin qui sont filmées par les sténopés que portent sur eux les agents du Service Spéculatif, garants et gardiens de la vérité choisis en raison de leur capacité à sentir le mensonge comme des chiens un os.

Laszlo Ratesic est l'un de ces Spéculateurs. Solitaire et taciturne, il se retrouve affublé à son corps défendant d'une stagiaire, Aysa Paige, qui se révèle bien plus douée que lui dans l'intuition et la détection du mensonge.


Et voilà que sur une affaire banale, la chute accidentelle d'un couvreur du toit sur lequel il se trouvait, Laszlo et Aysa mettent à jour une anomalie imprévue – une altération de la vérité qui se révèle de fil en aiguille bien plus grave qu'il n'y paraissait au départ. Commence alors pour les deux Spéculateurs une enquête risquée qui met en cause les fondements même du Golden State, car ils vont s'y trouver confrontés à des faits que les autorités décrètent « inconnus et inconnaissables » et découvrir que, dans l'ombre, des citoyens œuvrent à miner les fondations de l'Etat de la vérité vraie.


"Golden State" est un thriller aussi intrigant que trépidant, non dénué d'humour dans sa description d'une société obsédée par la vérité intrinsèque de toute chose (d'ailleurs, l'humour y est autorisé car chacun comprend bien que la non vérité énoncée l'est à stricte fin comique). On y parcourt un monde où les romans de fiction sont blasphématoires, où les chaînes de télé proposent uniquement des flux de captures – autrement dit des faits vrais –, et où, hormis les romans documentaires, ne sont autorisés que quelques livres communs qui servent à consolider la réalité partagée : Index géographique, Almanach, Dictionnaires, etc.

On y suit l'improbable couple Laszlo/Aysa au fil de son enquête et, magie des flashbacks, au cœur des éléments significatifs de leurs passés respectifs. On y visite aussi un Etat qui – à l'opposé de l'Oceania de 1984 – sacralise la vérité, l'enregistre sans cesse jusque dans ses moindres détails, et punit bien plus sévèrement un menteur qu'un voleur. On y découvre, avec les deux enquêteurs, qu'il n'existe in fine pas plus de vérité indiscutable et univoque qu'il n'y a de soi intime que nous pourrions être – si on en croit les magazines – par-delà les masques que nous arborons chaque jour et qui forment les facettes de nos identités sociales.


Si les deux premiers tiers sont très agréables à lire, le troisième tiers paraît plus confus, plus rapide aussi, moins travaillé, un peu décevant. Dommage. Et puis, on se demande aussi ce qu'a voulu signifier Ben H. Winters. Son pamphlet anti post-vérité – mais en est-ce un ? – a des airs très nets de dystopie. Alors y a-t-il égalité entre deux maux ? On a peine à croire que ce soit l'opinion de quelqu'un de sensé.


Golden State, Ben H. Winters

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