Bog People - Hollie Starling

Bog People est une « Working-class anthology of folk horror » , éditée par Hollie Starling.   Working-class anthology car, dixit Starling en préface, les textes rassemblés dans ce volume parlent de cette classe populaire britannique qui est l’objet d’une attention ambivalente de la part des CSP+, dans une société où le système des classes est bien plus évident et prégnant qu’en France. Working-class anthology encore, car dixit toujours Starling, les auteurs réunis ici ont montré patte blanche sur leur appartenance présente ou passée à la classe populaire. Une forme de #OwnVoices donc. Fidèle à l’assertion de Max Weber selon laquelle il n’est pas besoin d’être César pour comprendre César, je suis toujours aussi peu fan de cette approche ; nous verrons bien, rien ne dit que ça nuise.   Folk horror ensuite car c’est du peuple tel qu’en lui-même que veulent nous parler ces textes, de ce peuple britannique qui continue à exister loin de la modernité mo...

Quality Land - Marc-Uwe Kling


Pour sortir d'une crise économique sans précédent, le Pays (qui ressemble furieusement à l'Allemagne de l'auteur) s'adresse à un cabinet de consultants qui décide que le Pays a d'abord besoin d'un nouveau nom et d'une nouvelle philosophie. Nouvelle Country Identity, le Pays devient Quality Land. Passage au Quality Time, organisation en quatre grandes villes bien réparties Growth, Progress, Profit et la capitale Quality City, obligation de l’utilisation du superlatif (un choix excellentissime). Last but not least, les noms de famille changent, assez de Wagner, Schneider, and so on. Les garçons portent comme nom le métier de leur père au moment de leur conception, les filles celui de leur mère. Ainsi, le héros du roman s'appelle Peter Chômeur.


"Quality Land" est un roman de Marc-Uwe Kling. Auteur et stand-upper, Kling livre ici un texte qui a les défauts et qualités du stand-up.


A son actif, Kling vulgarise des thématiques que nul aujourd'hui ne devrait ignorer.

Organisation du monde par des algorithmes dont peu de citoyens (ou personne) connaissent vraiment les critères de décision, leur pondération ou leurs interactions (ne pensons qu'à Parcoursup).

Assistants personnels omniprésents capable même de dicter des conversations ou d'entretenir la vie online de leur possesseurs sans leur intervention.

Consumérisme délirant au point qu'à Quality Land réparer est interdit (Peter est ferrailleur, il détruit – ou pas – les machines défectueuses), et que The Shop, Le magasin en ligne, envoie sans demande les produits que les consommateurs « désirent ».

Appli de rencontre, Quality Partner, – captant un nombre incroyable de données personnelles – qui suggère proactivement par une notification le meilleur (le seul) partenaire, quitte à larguer l'actuel (l'appli peut même le prévenir).

Quality Litterature, les classiques réécrits pour être politiquement corrects et optimistes.

Citoyens classés en catégories/profils qui déterminent les propositions qu'ils reçoivent, les amis qu'ils sont susceptibles d'avoir, les passe-droits éventuels – la rupture de Peter avec Sandra Admin, classée au dessus de lui, le fait chuter dans le crédit social, avec une dégradation associés de ses opportunités.

Manipulation de la politique par la publicité ciblée par profils et la microsegmentation de l'électorat.

Monde politique divisé lors d'une campagne électorale hystérique entre technocrates (représentés par un androïde progressiste) et populistes xénophobes agressifs – actant le décès des Grandes Coalitions à l'allemande.


Ajoutons au fond, des pages intermédiaires de pub ou de tchats à la Tous à Zanzibar, une aventure absurde (Peter veut rendre un vibromasseur dauphin rose qu'il a reçu et dont il ne veut pas) dont le déclencheur est aussi inepte que celui de Brazil, certaines scènes vraiment drôles, des dialogues « pédagogiques » qui réussissent en général à n'être pas lourdingues, une légèreté d'écriture qui fait que ça se lit vite et bien.


Au passif de "Quality Land", on trouve les côtés survol et clin d'œil du genre stand-up.

Roman à clef GAFA il est si transparent que l'effet s'annule de lui-même.

Tout ce dont il parle est juste, existant ou probable à court terme, mais rien ne surprendra ni n'apprendra du neuf à un lecteur d'Imaginaire.

Même un non lecteur d'Imaginaire connaît ces thématiques et leurs implications s'il s'intéresse à ces questions, quant au slogan « si c'est gratuit c'est toi le produit », il le prononce déjà sûrement déjà dix fois par jour pour convaincre.

Le tout ne pourra être donc une révélation que pour un béotien, auquel les dialogues pédagogiques seront sûrement utiles aussi.


Alors lire "Quality Land", why not ? Pour rire un coup avec une histoire qui est une succession de saynètes pensées pour être amusantes.

Et surtout, peut-être, l'offrir à quelqu'un de l'entourage qui ne connaît pas ces questions, ne s'y est jamais intéressé, pense que tout ça c'est de la prise de tête. Là, ce Meilleur des Mondes pour notre temps prend son utilité et son sens. Alors mettre en liste pour fête des mères, des pères, Noël, etc.


Quality Land, Marc-Uwe Kling

Commentaires