The End of the World as we Know it - Anthologie The Stand

Il y a des années j’ai lu et apprécié The Stand – même si j’ai un peu allégé ce très (trop) long roman. J’ai ensuite lu l’adaptation BD , ce qui prouve que mon appréciation n’était pas fake. Voilà que sort une anthologie coécrite par certains des bons auteurs du moment. Elle revisite l’univers de The Stand , y retourne, nous en dit plus sur des choses que King n’avait pas trouvé le temps de raconter, nous offre le plaisir coupable de retourner arpenter une terre ravagée. Edité par Christopher Golden et Brian Keene, doté d’une introduction de Stephen King, d’une préface de Christopher Golden et d’une postface de Brian Keene, The End of the World as we Know it rassemble des textes de Wayne Brady et Maurice Broaddus, Poppy Z. Brite, Somer Canon, C. Robert Cargill, Nat Cassidy, V. Castro, Richard Chizmar, S. A. Cosby, Tananarive Due et Steven Barnes, Meg Gardiner, Gabino Iglesias, Jonathan Janz, Alma Katsu, Caroline Kepnes, Michael Koryta, Sarah Langan, Joe R. Lansdale, Tim Lebbon, Josh...

La mort vivante - Vatine - Varanda


"La mort vivante" est d’abord un roman de Stefan Wul publié en 1958. C’est maintenant aussi un one-shot de BD de très grande qualité.

Des siècles après les guerres et les catastrophes (sûrement nucléaires) qui ont rendu la Terre très dangereuse à habiter, le gros de l’humanité vit sur les planètes proches, notamment sur une Mars terraformée, totalitaire et anti-scientiste.
Sur la planète mère restent des aventuriers et des marginaux, scavengers qui récupèrent, au milieu des ruines, livres oubliés et matériels abandonnés pour les revendre au plus offrant. Un trafic lucratif mais une activité dangereuse en terrain non sécurisé. Cette vérité éclate à la face du lecteur dès le tout début de l’album quand la jeune fille de la patronne de l’opération, Martha, glisse du haut d’un immeuble vers une mort certaine.
Bien plus tard, toujours inconsolable, Martha « engage » le scientifique martien Joachim pour cloner sa fille morte et lui rendre sa vie perdue - un projet dérangeant rendu carrément malsain par les modalités qu'impose Martha.

Evoquant autant la folie de Frankenstein que suggérant les risques d’une science génétique sans contrôle, l’histoire porte aussi les inquiétudes d’apocalypse nucléaire qui étaient celles de l’époque du roman, ainsi que l’espoir un peu vain d’une échappatoire pour l’humanité sur des planètes qu’ils n’auraient pas encore ruinées.
Mais, plus que de la folie des humains, c’est de la folie d’une mère qu’il est question ici. Dans le château pyrénéen qu’elle habite, entourée de serviteurs et d’un cyborg domestique qui rappelle le monstre de Victor Frankenstein, Martha force, tente, et séduit Joachim, jusqu’à lui faire accomplir des actes qu’il désapprouvait.
Vouloir vaincre la mort de son enfant, vouloir revivre sa maternité même, passer toutes les barrières morales et personnelles pour ce faire, Martha, en dépit de sa dignité glacée de patricienne, est une femme que la perte a rendu assez folle pour ne plus percevoir ni le risque pris ni l’opprobre encourue. Une folie qu’elle impose à Joachim et à laquelle le lecteur assiste, impuissant.

L’ambiance lourde (et presque scandaleuse) du récit est servie et potentialisée par le dessin parfait de Varanda. Des personnages évoquant un gothique Hammer peuplent un monde en ruine au milieu duquel la forteresse néo-gothique de Martha semble un repaire sécurisé. Nuit et tempête ajoutent aux références, sans oublier des araignées inquiétantes en dépit de leur docilité. Proche de l’illustration, souvent presque monochrome, le relief et les ombres du château ainsi que de l’histoire elle-même sont rendus par des jeux de contraste et un tramage hachuré omniprésent qui texture la création graphique jusqu’à lui donner une profondeur et une réalité angoissantes (Varanda dit en itw que « sur deux de mes pages il peut y avoir autant de traits que sur un seul album de certains auteurs…c’était épuisant »).

Histoire et dessin prennent progressivement à la gorge, installant un malaise que la fin de l’album ne dissipe pas, au contraire. Un must-read d’une très grande beauté graphique et d’une grande intelligence narrative.

La mort vivante, Vatine, Varanda

Commentaires