La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

La Terre bleue de nos souvenirs - Alastair Reynolds - BOF


Laurent Leleu écrivait dans Bifrost 80 « De quoi faire retomber illico le quadragénaire à l’époque de l’âge d’or, quatorze ans en gros… ». C’est exactement le sentiment que j’ai eu, pensant en moi-même que, si le livre n’était pas si gros, je le passerais volontiers au mini Gromo de dix ans. Et que lui saurait en tirer ce qu’il a à offrir.
Moi, je suis plus vieux et, comme les matriarches éléphants, j’ai maintenant le cuir trop dur.

XXIIème siècle. Le réchauffement climatique a eu lieu, comme attendu, mais il a été géré et finalement maitrisé. D’immenses systèmes d’énergie solaire (africains) occupent le centre de l’Afrique et alimentent le monde. Des murs spéciaux (chinois) contiennent le montée des eaux côtières. La civilisation humaine s’est déplacée vers le Nord et sous les océans ; il y a maintenant de fait deux planètes en une, et donc deux ONU, l'une terrestre, l'autre aquatique. Hors du puits de gravité, des colonies existent sur la Lune, sur Mars et ses satellites, et au-delà. Plus loin, ce sont des usines automatisées qui expédient vers le système solaire intérieur l’eau et les minerais extraits des astéroïdes.

Techniquement, les modifications génétiques permettent d’envisager la panspermie, et l’illusion consensuelle de la matrice est physiquement dans les têtes. En effet, des implants ad hoc offrent à chacun l’accès permanent à un réseau informatique mondial et à des systèmes de réalité augmentée. Les humains peuvent même « habiter » des véhicules corporels extérieurs, artificiels ou humains, pour augmenter leur niveau de présence. Mais surtout, les implants personnels (plus des myriades de capteurs passifs disséminés partout) font que chacun vit sans cesse sous le regard du Mécanisme (rien que le nom m’amuse). Génie tutélaire informatique bienveillant (sur lequel on sait peu de chose finalement), le Mécanisme empêche tout acte d’agression par intervention directe et paralysante sur les implants. Pas qu’il ait souvent à intervenir ceci dit, car d’autres modifications corporelles ont éradiqué la plupart des pulsions agressives de l’espèce humaine. Pour que cette Suède circumplanétaire soit complète, toute intervention du Mécanisme donne lieu à de longues procédures d’évaluation et de rééducation du perpétrateur ainsi qu’à une autocritique aussi horrifiée que spontanée
L’espèce humaine vit donc dorénavant dans un Kindergarten planétaire où rien ne la menace, ni l’environnement ni elle-même.

Dans ce paradis futuriste vit la famille Akinya, devenue richissime et très puissante grâce au développement du solaire - imaginez la famille de Nigel Sheldon en Afrique. La fondatrice de la dynastie, Eunice, que plus personne n’avait vue depuis des décennies, vient de mourir dans la base orbitale dont elle avait fait son lieu de réclusion volontaire. La firme est maintenant tout à fait entre les mains des bien méchants Lucas et Hector, les cousins qui la dirigeaient déjà. L’autre branche familiale est constitué de Geoffrey, idéaliste qui étudie les éléphants d’Afrique et rêve de « fusionner » avec eux, et de sa sœur Sunday, une artiste un peu crevarde qui a choisi de vivre sur la Zone non observée de la Lune, loin du regard du Mécanisme. A l’issue des obsèques, les cousins proposent à Geoffrey contre rétribution/menace d’aller chercher pour eux, sur la Lune, ce que peut contenir le coffre bancaire qu'y possédait leur énigmatique grand-mère. C’est le point de départ d’un jeu de piste menteur à travers le système solaire qui va emmener les protagonistes vers l’infini et au-delà et exacerber la confrontation feutrée entre factions humaines (même si on en reste à des coups de papattes).

Au tout début, j’ai cru avoir affaire à une réécriture de Citizen Kane. Puis j’ai fini par chercher sur Internet pour savoir si ce roman était Jeunesse ou au moins YA. La simplicité du récit, la faiblesse du world building, le jeu de piste un peu absurde qui ne sert finalement à rien d’autre qu’à balader les protagonistes à travers le système solaire en vain et à organiser des rencontres improbables (le dernier moment sur Mars en étant l’illustration le plus évidente), font vite baisser la jauge de l’intérêt. De plus, la bonhomie ostensible des personnages, leur manière de s’exprimer à coup de « petit frère » et autres, leurs oppositions qui semblent devoir se régler à coup de tirage de langue, le vocabulaire même qui est utilisé pour décrire, laissent supposer une cible jeune et bien aimable. No sex, no drugs and no rock’n’roll chez les Akinya ; j’avais l’impression de relire le Leviathan de Westerfeld.

Que l’homme qui a créé le très dark Cycle des Inhibiteurs soit aussi l’auteur de ce roman amène à se demander si Mr Hyde est l’auteur du premier et le Dr Reynolds du second.

La Terre bleue de nos souvenirs, Alastair Reynolds

L'avis de Lorhkan, Lune, Cornwall, Lhisbei

Commentaires

Anudar a dit…
Je suis dessus et donc je m'abstiens de lire ta chronique en entier, mais... une bonne partie de ta déception ne vient-elle pas de ce que dans ce livre la civilisation a trouvé le moyen de s'adapter avec succès au réchauffement climatique ?
Gromovar a dit…
Surtout les personnages.
Lorhkan a dit…
Je le redis ici : c'est une intro. Le meilleur reste à venir. Ceci dit, c'est à mon avis une bonne intro, mais une intro quand même (de presque 600 pages...).
Et je te rejoins sur le worldbuilding déficient : que sont devenues l'Amérique et l'Europe ? Qu'est ce qui a conduit l'Afrique a devenir le centre névralgique du monde ? Dans quelles circonstances ? Aucune info (peut-être plus tard...). L'histoire de la conquête spatiale reste très floue également...

Pour le reste, tu fais ton Gromovar. :D
Gromovar a dit…
Les personnages, c'est juste pas possible.

Les délires avec les chinois sur la Lune, idem.

Et honnêtement, une intro de 600 pages, ça s'appelle du foutage de gueule. Sans compter que c'est quand même pas bien brillant du point de vue de l'histoire.
Lorhkan a dit…
Je ne peux pas te contredire sur ce dernier point... Mais il a signé un gros contrat avec Gollancz pour 10 livres en 10 ans, donc peut-être que tirer à la ligne de temps en temps peut l'aider à toucher le pactole !... ;) Bon ok, je suis méchant là... ^^
Vert a dit…
Mince tu le traites de Young Adult, c'est carrément insultant venant de toi xD
Moi je l'ai bien aimé, un peu de SF positive ça fait pas de mal (et tant pis pour l'intrigue un peu téléscopée).
Gromovar a dit…
T'as pas idée comme je me suis emmerdé ;)