Mariana Enriquez - Un lieu ensoleillé pour personnes sombres

Des voix magnétiques, pour la plupart féminines, nous racontent le mal qui rôde partout et les monstres qui surgissent au beau milieu de l’ordinaire. L’une semble tant bien que mal tenir à distance les esprits errant dans son quartier bordé de bidonvilles. L’autre voit son visage s’effacer inexorablement, comme celui de sa mère avant elle. Certaines, qu’on a assassinées, reviennent hanter les lieux et les personnes qui les ont torturées. D’autres, maudites, se métamorphosent en oiseaux. Les légendes urbaines côtoient le folklore local et la superstition dans ces douze nouvelles bouleversantes et brillamment composées, qui, de cauchemars en apparitions, nous surprennent par leur lyrisme nostalgique et leur beauté noire, selon un art savant qui permet à Mariana Enriquez de porter, une fois de plus, l’horreur aux plus hauts niveaux littéraires. Un lieu ensoleillé pour personnes sombres , le dernier recueil de nouvelles de Mariana Enriquez, sort en VF aux Editions du Sous-Sol dans une trad...

Tainaron - Leena Krohn, la ville des Beetles

"Tainaron", une ville fictive inventée par l’auteur finlandaise Leena Krohn. Une ville weird qui rappelle celle des Saint et des Fous de Vandermeer. Une ville habitée par une race insectoïde, décrite au fil de trente lettres par une narratrice inconnue et humaine en visite à Tainaron, pour une raison que le lecteur ne connaitra pas, et qui n’a pour seul guide (fixer devrait-on dire) que le taciturne Longhorn, insecte de son état.

D’une missive à la suivante, le lecteur pénètre ce topos définitivement étranger. Il y croise les lucioles - fascinantes et éphémères, la reine – écrasée par le poids de sa maternité servile, le prince – désespéré depuis la perte de son amour, des insectes en cours de métamorphose – gelés dans d’interminables phases pupiques – que le processus transforme au point d'en faire de toutes nouvelles personnes. Il y apprend aussi l’existence d’un culte sacrificiel, l’impossibilité de cartographier une ville en transformation constante, et y côtoie des personnages qui inquiètent par l’étrangeté de leur incompréhensible comportement. De processions étranges en souvenirs et regrets d’une vie d’avant, il y partage les rythmes d’une ville que l’hiver menace, la certitude d’une hibernation à venir, l’effroi optimiste de nouvelles métamorphoses qui changeront les habitants autant qu’elles transformeront la ville.

Etranger, poétique, surprenant, "Tainaron" emmène le lecteur dans un voyage en terre inconnue. Le (court) livre est d’une lecture douce et apaisante même si on peut regretter une lenteur/langueur par moments pesante. Une fois refermé, on aimerait des suites, plus dynamiques, on aimerait que des individualités fortes s’invitent dans la communauté des insectes, on aimerait qu’après avoir raconté un lieu Krohn y installe une histoire.

On notera que Krohn, qui a failli obtenir le World Fantasy Award pour "Tainaron", vient de voir beaucoup de ses œuvres traduites en anglais dans l’omnibus Collected Fiction, préfacé par Jeff Vandermeer ça n’étonnera personne.

Tainaron, Leena Krohn


L'avis de Martlet

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