Lazarus Intégrale 2 - Rucka et Lark

Juste un mot pour signaler la sortie de l’imposant tome 2 de l’Intégrale Lazarus publiée par Urban Comics. Après les manœuvres du premier tome , c’est la guerre. Elle commence à bas bruit après la disparition de Jonah, le fils traître des Carlyle, en territoire Hock, se poursuit par une négociation conflictuelle tendue et violente entre les familles avant de devenir chaude et active, une vraie guerre avec combats, destructions, soldats tués, et alliances mouvantes qui fluctuent en fonction des résultats de la confrontation sur le terrain. Dans le monde à la Walter Jon Williams imaginé par Greg Rucka et dessiné (plus ou moins bien) par Michael Lark, les enjeux s’élèvent et avec eux les questions posées et les fils à démêler : Carlyle gagnera-t-il sa guerre ? Conservera-t-il ses alliés ? Comment la guerre affectera-t-elle l’équilibre des pouvoirs à l’intérieur même de la famille Carlyle ? Forever, le Lazare de Carlyle, découvrira-t-elle la vérité sur ses origines ? Découvrira-t-elle l’

Hush-hush


"When gravity fails" (Gravité à la manque en VF, prochainement réédité par Mnémos), de George Alec Effinger, est un roman nominé mais non primé au Nebula 87 et au Hugo 88. Il est le premier de la trilogie « Audran Marîd », du nom de son héros.

Fin du XXIIème siècle, quelque part au Moyen-Orient. L’aire arabo-musulmane a connu croissance et prospérité quand les nations occidentales, comme leur Némésis soviétique, se fracturaient en une multitude de petits Etats souverains querelleurs.

Audran Marîd vit dans le Budayeen, le quartier criminel de la grande cité dans laquelle le roman prend place. Dangereux, le Budayeen est l’épicentre de l’activité criminelle de la ville. Trafics en tout genre, drogue,  prostitution, et la violence qui accompagnent ces activités, s’y donnent libre cours au vu et au su de tous, sous le regard lointain d’une police qui se borne souvent à compter les points. Le vrai pouvoir dans le quartier est entre les mains de l’omniscient et omnipotent Friedlander Bey. Au bas de l’échelle criminelle mais respecté pour son intégrité, Audran vit de petites affaires et de travail occasionnel de détective, entre bar à hôtesses et consommation excessive de drogue. Sa compagne, Yasmin, est une entraineuse, transgenre comme beaucoup des locaux. Quand le dernier client d’Audran est assassiné sous ses yeux, il se retrouve projeté à son corps défendant au cœur d’une affaire qui le dépasse et dans laquelle les cadavres vont s’accumuler.

Ce roman est souvent présenté comme cyberpunk mais on peut penser qu’il a plus surfé sur la vague initiée par Neuromancien que plongé dedans. "When gravity fails" tient bien plus au noir, technologique certes, qu’au cyberpunk. Pas de hacker dans le roman, pas de réseau informatique, seulement des add-ons cérébraux permettant d’acquérir des compétences nouvelles ou d’endosser des personnalités complètes. Audran, chanceux ou pas, bénéficiera de modifications supplémentaires permettant de contrôler ses états mentaux. Tout ceci est bien modeste en terme de cyberpunk. Et même ça est sous-exploité.

En revanche, "When gravity fails" est résolument un roman noir. Audran, détective désabusé et addict, entraine le lecteur dans les profondeurs du quartier. Ce dernier y découvrira le demi-monde de la petite criminalité et de la prostitution. Il y croisera ces barmaids auxquelles on se confie nuitamment, ces dealers d’alcool ou de drogue qui permettent de tenir, ces receleurs spécialisés dans un import/export de bon aloi, ces travailleurs du sexe qui représentent une bonne partie de l’activité économique locale. Il y sera introduit au fonctionnement des vrais réseaux de pouvoir qui quadrillent la zone.

Et l’intérêt du roman est là. Dans la personnalité d’Audran, ses doutes, ses failles, sa répugnance à s’impliquer. Dans ses moments réalistes de quasi overdose. Dans sa relation compliquée avec son amie. Dans sa déambulation continuelle au sein du monde interlope du Budayeen, dans le rôle de guide qu’il joue auprès du lecteur.

D’autant que la Night City d’Effinger est en monde musulman, donc culturellement très différente des univers de Chandler comme de Gibson. Prégnance de la religion, innombrables salamalecs qui précèdent chaque conversation, fatalisme ultramondain, la cité d’Audran est fondamentalement autre, même si les passions qui s’y exercent ne diffèrent guère des nôtres. Il peut sembler convenu de parler des Mille et une Nuits, mais un certain passage, dans lequel Audran se cache chez des bien plus pauvres que lui, rappelle inévitablement les récits de voyageurs perdus puis hébergés qu’on y rencontre.

La description détaillée qu’Effinger donne de la vie d’un quartier criminel, transposition paraît-il de son expérience du Quartier Français de la Nouvelle Orléans (on y est loin de Poppy Z. Brite quand même), suffit à rendre le roman très intéressant à lire. L’enquête est presque secondaire. Audran y va à pas comptés et les évènements viennent à lui plus qu’il ne les provoque. Les choses finissent par se résoudre, et la vie continue. Pour le lecteur, comme pour ces touristes qui viennent s’encanailler, à leurs risques et périls, dans le Budayeen, le voyage fut dépaysant. Et sûr, ce qui ne gâche rien.

When gravity fails, Gravité à la manque, George Alec Effinger

Commentaires

chris a dit…
Oh, ce roman me rappelle des choses. Je crois que Casus Belli avait fait une aide de jeu sur celui-ci avec le JDR Cyberpunk....
Gromovar a dit…
Il y a eu un supplément officiel pour Cyberpunk 2020. Casus, je ne sais pas.
Lorhkan a dit…
Excellent roman lu il y a fort longtemps, et dont la réédition prochaine chez Mnémos (avec les deux autres romans et les nouvelles) me fait les yeux doux.
Roman noir un peu cyberpunk, situé dans un contexte géographique et politique décalé par rapport aux standards occidentaux, on a là l'ancêtre des oeuvres de Ian McDonald non ? ;)
Gromovar a dit…
Yep. Et c'est toi qui m'a remis ce roman en mémoire.