Au début de "
Nos années Strange", Jean-Marc Lainé écrit « La grande fautive étant ma Maman, qui m’a acheté Nova n° 38 en 1981 ». Je dénonce la mienne pour Strange n° 77 en mai 1976. Un souvenir inoubliable. Extérieur jour. Place Jean Jaurès (la Plaine) à Marseille. Kiosque à journaux. Je demande, comme à chaque fois que j’approche d’un kiosque, ce que j’appelle un « livre ». J’ai 8 ans, je ne connais ni Marvel, ni Strange, ni la notion de comics, ni les super-héros. Quand je me fais offrir un « livre » d’habitude, c’est Picsou ou Pif. Et là, un « robot » (Iron Man O_o, quel béotien) à la mâchoire aussi male que celle de Papy Boyington brise les chaines de l’oppression sous mes yeux. Ouch ! Il me le faut !
J’entre dans un monde que j’ignorais et qui m’hypnotise immédiatement. Plus dure est donc la chute une fois le magazine fini et refermé ; contrairement à celles de Pif ou de Picsou, les histoires de Strange ne se terminent pas à la fin de l’épisode. Il y a une suite à venir (et, bien pire pour un collectionneur, des évènements non vus qui ont précédé). Voilà c’était fait. J’ai attendu avec impatience de pouvoir acheter le n°78. Puis j’ai découvert les autres magazines de super-héros (auxquels je me suis mis), puis j’ai fait les bouquinistes pour acheter les anciens numéros (imagine-t-on la douleur de savoir qu’on a raté l’apparition des Sentinelles), puis j’ai fini par budgéter chaque mois des dépenses de matériel LUG qui ont rapidement représenté 100% de ma consommation, et certains mois, quand les étoiles étaient alignées et qu’entraient en collision mensuel, bimestriel, trimestriel, albums spéciaux, il fallait demander des rallonges de tous cotés pour arriver à suivre. Heureusement, sur le marché monétaire de ma mère et de ma grand-mère, je bénéficiais d’un triple A. Précisons que je ne les remboursais jamais, ce qui prouve que la méfiance des prêteurs est parfois justifiée.
Je ne vais pas redire ici, moins bien, ce que Sébastien Carletti et Jean-Marc Lainé ont dit, mieux, dans leur superbe ouvrage. Je dirai simplement que "
Nos années Strange" est un feu d’artifice, indispensable pour toute personne qui a croisé le chemin des éditions LUG, et culturellement intéressant pour les autres. Qu’on sache que c’est magnifiquement réalisé. L’historique du monde des comics de super-héros et des éditions LUG est exhaustif, ainsi que celui des autres maisons d’éditions qui ont suivi, repris, travaillé avec. Le nombre d’illustrations est très élevé (en moyenne huit par double page sur presque 100 double pages). D’innombrables couvertures sont reproduites. Elles ramèneront le lecteur des années en arrière. Le n° 100 « spécial », le 104 de sinistre mémoire, le 77 (à jamais mon premier), le 184 où Iron Man déchoie, le Special Strange 23 qu’on ne peut lire sans trembler, les premiers (et suivants) Titans, Spécial Strange, Spidey, Nova, Mustang, les Spécial Posters, Spécial Origines, même les Spécial Vacances, les albums des Fantastiques ou de Spiderman. Les auteurs racontent tout, montrent tout, expliquent tout, y compris le contexte héroïque de l’époque dans les autres médias avec "L’homme qui valait trois milliards", "Super Jaimie", "L’homme de l’Atlantide", le début des mangas ou les productions de DC Comics, etc… C’est un monument d’érudition strangistique. D’autant que la 4ème de couv’ et les rabats intérieurs sont identiques à ceux des véritables Strange. Il y a donc beaucoup plus dans "
Nos années Strange" qu’une madeleine de Proust (et pourtant elle est énorme et délicieuse la madeleine). Il y a un impressionnant travail documentaire qui, sans être exhaustif l’est presque, et fera date pour longtemps comme l’ouvrage de référence sur le sujet.
Je pourrais continuer longtemps et parler des Comics Pocket, de Flash, de Héros 2000, et de maintes autres choses qu’on trouve dans les pages de "
Nos années Strange", qui parlent à la mémoire et font vibrer les tripes, mais je crains de commencer à ennuyer en étant trop long sur l’avalanche de conséquences qui a suivi l’achat de ce Strange n° 77, évènement fondateur qui a fait d’un enfant innocent (qui sinon aurait pu devenir surfeur ou haut fonctionnaire) Gromovar.
Nos années Strange 1970/1996, Sébastien Carletti, Jean-Marc LainéLa maison ne reculant devant aucun sacrifice vous offre le n° 77
Commentaires
N'ayant découvert les comics que sur le tard et n'ayant pas de véritable passion pour le genre, juste une saine curiosité, je passerai mon chemin.
Un témoignage intéressant pour moi qui n'ai pas non plus reçu cette passion( pour des héros dont les histoires se poursuivent indéfiniment?).
Déjà au début des années 80 nous regardions trois dessins animés qui allaient annoncer une vague déferlante d'un autre genre(goldorak, candy, albator).
Une question de génération ?
Une question de génération ?
La prochaine étape est d'essayer de deviner l'age du capitaine :
Premier indice, lisait-il ses scénarios de jeux de rôle (ADD 1) sur le magazine Jeux et stratégie ? (un magazine que les traqueurs de moins de 20 ans ne peuvent pas connaître eu....)
http://www.abandonware-magazines.org/affiche_mag.php?mag=188&num=3934&images=oui
Une découverte qui m'a donné la passion du médiéval fantastique, dans les jeux de rôles, figurines, BD, jeux vidéos et bien sûr romans. Passion jamais démentie...
Quant aux comics, autre passion dévorante que j'ai ravivée il y a peu, je te bats de quelques numéros (http://marvelverse.blogspot.com/2011/10/mes-annees-strange.html)
et mon exemplaire de Nos Années Strange est dédicacé (http://marvelverse.blogspot.com/2011/11/nos-annees-strange-1970-1996.html) ce qui en fait une relique + 5 Vorpale, niark, niark !