Frankenstein - Michael Walsh

  Avant de donner vie à sa créature, le docteur Henry Frankenstein a profané bien des tombes, exhumé bien des cadavres, rassemblé bien des membres. De ces dépouilles est né un nouvel être, mais celui-ci est-il véritablement nouveau ? Se pourrait-il que ces jambes, ces bras, ces mains se souviennent de leur ancien propriétaire, des individus qui ont, sans le vouloir, contribué à la création du monstre de Frankenstein ? Bon, maintenant, pour ces chroniques BD, je fais court. Je suis las de passer du temps à juste te prévenir, lecteur, du caractère clairement optionnel de tel ou tel album. J’adore Frankenstein depuis des décennies. J’adore le roman, j’adore le film de 1931. Je pense qu’ils font partie des grandes œuvres du patrimoine humain. J’attendais donc avec grande impatience la sortie de cette adaptation par Michael Walsh chez Urban, surtout après la choc que fut l’adaptation de Dracula par James Tynion IV (et en dépit de la déception que fut celle de L’Etrange créature du lac ...

Eric Zemmour is a variant 13


Richard Morgan est un excellent auteur de SF. Il est capable d'imaginer des histoires crédibles dont les effets du progrès technique soient les moteurs. En cela il rejoint Jules Verne. Son premier roman, chroniqué ici, utilisait d'une manière extrèmement imaginative le concept de numérisation de la mémoire; dans "Black Man" c'est de modifications génétiques qu'il est question.
Comme William Gibson, qui inventa le Cyberpunk dans l'inégalé "Neuromancien" en intégrant des systèmes informatiques à des hommes, Richard Morgan crée une science-fiction proche de notre temps, moins chatoyante que celle de Gibson mais de fait plus crédible.
Comme son premier roman "Carbone modifié", "Black Man" est un polar. Dans un monde où des expériences de génie génétique sont effectuées en secret par les Etats pour tenter de créer des troupes d'élite, sous le contrôle d'une ONU qui tente de les en empécher, une série de meurtres sans liens apparents est commise par une chimère génétique, revenu de Mars dans des conditions atroces mais caractéristiques, un variant 13, produit d'un laboratoire militaire aux caractéristiques de male alpha conçu pour servir de troupe de choc, est soupçonné d'être à l'origine de ces meurtres. Un autre variant 13 est recruté pour l'arrêter. Je ne dévoile rien de plus. Sachez simplement que rien n'est aussi simple qu'il n'y paraît.
Le roman nous montre une Amérique déchirée, un monde où la puissance chinoise est dominante. Il manipule - et le lecteur l'est aussi - les notions d'ambition, de trahison, de secret. Il joue sans cesse sur les notions d'inné et d'acquis, de liberté par rapport à son hardware génétique. Il développe longuement l'opposition entre les variant 13, males dominants agressifs et sociopathes, et les humains standards qui les diabolisent et tentent de les contrôler mais en ont besoin pour mener leurs guerres, car, même si l'agressivité s'éteint, les conflits d'intérêts demeurent. Il décrit des projets de création et d'élevage de variants génétiques dignes de l'opération Lebensborn dans l'Allemagne nazie. Et on se dit alors qu'il y a suffisamment de dictatures sur Terre pour que ce type de programme soit mis en branle. Et on se dit aussi que les services spéciaux des démocraties feront certainement fabriquer par les dites dictatures les chimères qu'ils ne peuvent produire eux-mêmes. Le roman de Richard Morgan ouvre une voie d'interrogation crédible sur l'utilisation du génie génétique. Pour moi, quand la SF encourage une réflexion intelligente sur le monde tout en dépaysant, elle fait son travail.
Black Man, Richard Morgan

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