Bog People - Hollie Starling

Bog People est une « Working-class anthology of folk horror » , éditée par Hollie Starling.   Working-class anthology car, dixit Starling en préface, les textes rassemblés dans ce volume parlent de cette classe populaire britannique qui est l’objet d’une attention ambivalente de la part des CSP+, dans une société où le système des classes est bien plus évident et prégnant qu’en France. Working-class anthology encore, car dixit toujours Starling, les auteurs réunis ici ont montré patte blanche sur leur appartenance présente ou passée à la classe populaire. Une forme de #OwnVoices donc. Fidèle à l’assertion de Max Weber selon laquelle il n’est pas besoin d’être César pour comprendre César, je suis toujours aussi peu fan de cette approche ; nous verrons bien, rien ne dit que ça nuise.   Folk horror ensuite car c’est du peuple tel qu’en lui-même que veulent nous parler ces textes, de ce peuple britannique qui continue à exister loin de la modernité mo...

Léviathan - Brunschwig - Plus gros qu'une sardine !


Marseille. Aujourd’hui. Un violent tremblement de terre détruit une partie de la ville, autour du Vieux Port et de la Mairie, la Marseille des cartes postales.
Un tremblement de terre, ou pas.
On parle aussi d’une météorite, et il est clair qu’un énorme objet à l’air planté dans la ville, sur le site du Lacydon. Mais difficile de savoir. A l’épicentre tout n’est que mort et destruction et, autour, un périmètre de sécurité installé par l’armée empêche toute entrée au cœur de la zone dévastée.
Dans la ville meurtrie, les destins bouleversés s’entrecroisent et les mystères s’accumulent, entre la cause mal définie de la catastrophe, le positionnement de l’armée qui vise la mer de ses canons, et la découverte, au milieu des victimes, du corps d’une femme récemment abattue d’une balle dans la tête.

Avec "Après la fin du monde," tome 1 de la série Léviathan, le scénariste Luc Brunschwig, sur une idée de départ d'Aurélien Ducoudray, imagine une histoire complexe et très intrigante. Comme à son habitude, il tisse son récit de mystère, et développe des personnages riches aux relations réalistes.

Au fil du récit, on est avec les sinistrés, au cœur du désastre. Dans les morgues improvisées, dans le Stade Vélodrome devenu centre de rassemblement des sans abris – en particuliers les enfants isolés qu’il faut prendre en charge, dans les lieux officiels de recherche des disparus qui sont en fait des lieux d’identification des victimes, etc.
Comme dans ses autres œuvres, Brunschwig crée une réalité aussi diverse que dans le vrai monde, et pointe sa caméra sur des gens « normaux » que l’extraordinaire saisit. On y voit le désarroi de ceux qui réalisent que leur vie a changé pour toujours en quelques secondes terribles. On y voit des gens biens et des connards, des citoyens heureux et d’autres en plein marasme, des marchands de sommeil, du racisme ordinaire, de la récupération politique, dans une ville qui est absolument multiethnique. On y croise des hommes et des femmes - policier, pédopsychiatre, infirmière - qui essaient, chacun à leur niveau, d’aider leurs prochains à survivre et la ville à passer le cap. On y est témoin des petits trafics et arrangements typiquement marseillais qui permettent de lubrifier les rouages d’une ville pauvre et se révèlent très utiles en temps de catastrophe. On y constate l’omniprésence des médias qui traitent l’info par le petit bout de la lorgnette.

Brunschwig connait la ville, ça se voit, les mécanismes y sont. Et surtout il manie à merveille le parler marseillais, ce français mâtiné de patois, aux accents souvent ironiques et narquois, ici parfaitement juste et sans cliché aucun.

Tout est juste, les personnages comme le décor ; tout est finement ciselé, les situations comme la progression d’un récit dont on comprend qu’il lui reste encore beaucoup à révéler. C’est un bien beau travail scénaristique, une fois de plus, que Brunschwig – peut-être le meilleur scénariste actuel - offre ici au lecteur. Les dessins, eux, ne sont guère à mon goût, trop imprécis imho pour une histoire réaliste.

"Après la fin du monde" capture l’intérêt du lecteur et ne le lâche plus. C’est un travail d’orfèvre. Vivement la suite !

Après la fin du monde, Léviathan 1, Brunschwig, Ducoudray, Bossard

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