La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

Filigree and shadows


"20th century ghosts", de l'américain Joe Hill, par ailleurs scénariste de l'excellent Locke & Key, est un surprenant recueil de nouvelles fantastiques. Surprenant car toutes les nouvelles qu'il renferme ne sont pas fantastiques. Surprenant car même celles-là se lisent avec plaisir, alors qu'elles ne faisaient incontestablement pas partie du projet de lecture initial. C'est sans doute la marque d'un vrai talent.
Joe Hill est le fils d'un auteur de fantastique très connu qui est un peu le roi du genre. Nul doute que cette filiation le marque, comme un fer rouge sur la cuisse d'une esclave de Gor ; elle transpire en tout cas de la plupart des nouvelles du recueil. Beaucoup d'adolescence, de troubles de la différence réelle ou supposée, d'amitiés juvéniles, de relations père/fils, de longue adulescence ; même sans se jeter dans la psychologie de comptoir, il est difficile de ne pas supposer que l'ombre tutélaire du père a plané sur la vocation du jeune Joe. Et à le lire on peut penser que bon sang ne saurait mentir. Foutredieu !

Exceptionnellement, et parce qu'aucune nouvelle ne m'est tombée des mains, je vais parler de chacun des textes, dans l'ordre d'apparition :

Best new horror est une nouvelle très futée sur le caractère prévisible des récits d'horreur. Elle invite son lecteur à terminer lui-même l'histoire puisqu'il sait bien où elle va aller.

20th century ghost est une magnifique histoire de fantôme. Nostalgique et triste, elle est aussi un superbe hommage au cinéma et à ceux qui l'aiment.

Pop Art est une nouvelle étrange et belle. On pourrait la qualifier de kafkaïenne, tant l'anormalité semble n'y étonner personne au sein de la normalité. Histoire d'amitié et de tolérance, elle montre aussi, jusqu'à son issue tragique, que ce sentiment généreux n'est pas le plus répandu et que la différence n'est pas toujours une chance (a contrario de ce qu'affirme le catéchisme ambiant).

You will hear the locust sing est au mieux un scénario d'épisode de Twilight Zone. Elle peut sembler rendre hommage au Kafka de la Métamorphose mais elle ne le fait que dans la forme et jamais dans le fond.

Abraham's boys, malgré son atmosphère gothique, n'est sans doute pas parmi les meilleures nouvelles du recueil, mais elle permet à l'auteur de tuer le père, ce qui n'est déjà pas si mal.

Better than home est l'une de ces nouvelles où la qualité des personnages fait l'intérêt du texte. Il ne s'y passe pas grand chose mais le lien entre un père et son fils handicapé est superbement décrit, d'une manière qui ne peut qu'émouvoir.

The black phone n'est pas exceptionnelle non plus. Là aussi on termine en se disant que ça ferait un bon scénario pour une série d'horreur, sans plus.

In the rundown est une histoire dérangeante. Un freak se trouve par hasard dans une situation qui ne l'est pas moins que lui. Le récit met agréablement mal à l'aise, il lui manque juste une conclusion à la hauteur de son développement.

The cape est une grande nouvelle à chute, à tous les sens du terme. Orgastique.

Last breath est peut-être la moins nécessaire du recueil.

Dead wood. Qu'est-ce ? Fallait-il imprimer deux pages supplémentaires pour passer au tarif de gros ?

The widow's breakfast est une belle histoire non fantastique, qui parvient à être inquiétante par son atmosphère un peu irréelle.

Bobby Conroy comes back from the dead. Non fantastique, et pourtant captivante grace à ses personnages.

My father's mask est une nouvelle à l'atmosphère très trouble, qui m'a fait penser tout au long de la lecture au Eyes wide shut de Stanley Kubrick. Inquiétante et glauque, elle est le lieu où se réalise une passation père/fils, le jeune prenant la place du vieux.

Volontary commital est plutôt une novella. Captivante et inquiétante, elle ouvre des portes vers des contrées oniriques que je ne peux détailler plus ici. Où l'on découvre que la folie peut servir de clé d'argent.

Enfin, dans son afterword, Hill glisse une courte histoire de machines à écrire hantée par le fantôme d'un père qui veut désespérément continuer à écrire ses trois pages par jour.

Au final, un recueil de très bonne tenue dont aucune histoire n'est absolument rédhibitoire, même si toutes ne sont pas excellentes. Et même quand j'ai regretté une fin trop abrupte ou convenue, je n'ai jamais regretté le chemin. Un seul reproche : il y a vraiment beaucoup trop de baseball.

On notera que le recueil a été traduit et publié récemment par Lattès sous le titre "Fantômes : Histoires troubles", titre où se perd la saveur de la référence originale.

20th century ghosts, Joe Hill

Commentaires

Maëlig a dit…
Miam ça donne envie! Ca fait un moment que j'ai plus lu de fantastique contemporain en plus, ça serait l'occasion. Pas trop dur la lecture en VO?
Gromovar a dit…
Pas trop dur, non.
SI tu doutes, la VF est dispo.