La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

Pré-lynchien


Rien de fantastique dans "Enfer clos" malgré son tag, et pourtant le récit proposé est tellement borderline qu'il m'est impossible de ne pas le qualifier ainsi.
Tiré d'un fait réel, "Enfer clos" décrit l'enfermement de deux frêres et leurs deux soeurs qui, pour échapper à la honte, se cachent dans une maison de campagne à la fin de la guerre, en 1945, et n'en ressortent que 40 ans plus tard. 40 années de claustration durant lesquelles ces 4 prisonniers volontaires vont descendre jusqu'au fond de la bassesse et de la folie. Violences quotidiennes, viols incestueux, meurtre, cannibalisme ; en un temps aussi long les démons de l'esprit humain ont pu développer tout leur potentiel.
La narration de Claude Ecken retranscrit bien l'effacement progressif du temps dans une vie où n'existe plus qu'un éternel présent. Il introduit aussi subtilement la folie qui affecte tous ces prisonniers volontaires. Le roman se lit d'une traite tant on a envie de savoir jusqu'où ça peut aller.
Sur le pourquoi de ce déchainement de folie, Ecken ne donne explicitement pas d'explication. Il ne sait pas. Sur la passivité du village proche qui a vécu en sachant que cette maison existait et qu'il s'y passait de curieuses choses, non plus. En ce qui me concerne, ça m'a remis en mémoire un passage de Khalil Gibran : "Souvent je vous ai entendu parler de celui qui fait un faux pas comme s'il n'était pas l'un des vôtres, mais un étranger parmi vous et un intrus dans votre monde. Mais je vous dis que comme les saints et les justes ne peuvent s'élever encore plus haut que ce qu'il y a de plus noble en vous, ainsi les méchants et les faibles ne peuvent également sombrer plus bas que ce qu'il y a de plus vil en vous. De même que pas une seule feuille ne peut jaunir sans que l'arbre entier le sache tout en restant discret, ainsi nul homme ne peut mal agir sans que vous tous le vouliez en secret.".
Un seul regret, le style d'Ecken manque de folie et il ne donne pas à cette histoire lynchienne la démesure qu'elle imposait.
Enfer clos, Claude Ecken

L'avis des Singes de l'espace

Commentaires

La liseuse a dit…
J'ai rencontré l'auteur au salon de l'imaginaire du pays d'Aix en octobre. ce livre m'intriguait mais après avoir parlé avec lui, je me suis décidée à acheter Le monde, tous droits réservés. Ce livre (celui dont tu parles) est apparemment un livre-choc et très dérangeant. Même si j'aime me faire peur, la mention de cannibalisme suffit à me faire fuir.
Gromovar a dit…
Le monde, tous droits réservés, j'ai bien aimé les novellas, très peu les nouvelles en revanche.
Nolt a dit…
"Souvent je vous ai entendu parler de celui qui fait un faux pas comme s'il n'était pas l'un des vôtres, mais un étranger parmi vous et un intrus dans votre monde. [...] De même que pas une seule feuille ne peut jaunir sans que l'arbre entier le sache tout en restant discret, ainsi nul homme ne peut mal agir sans que vous tous le vouliez en secret."

--> Excellent, je ne connaissais pas mais c'est très juste.
En tout cas, ça se rapproche assez de ce qui m'a toujours effrayé dans le concept de "monstre" qui permet à l'homme de parfois échapper à la responsabilité voire au simple questionnement.

Des tueurs en série comme Ed Gein exercent très souvent une fascination morbide sur les gens (même les psychiatres qui les approchent) et pourtant la folie qui les touche est bien fondamentalement humaine.
Dans un autre registre, certains prêtent à Hitler un pouvoir quasi hypnotique, sentiment renforcé par des extraits de discours assez virulents... sauf qu'à l'époque, tout le monde ou presque s'exprimait ainsi. J'ai encore pu revoir hier une intervention du président Benes, alors que le sort de la Tchécoslovaquie est quasiment réglé, et il est curieux de constater qu'il a les mêmes intonations et la même gestuelle qu'Hitler. Pourtant le pauvre homme était bien différent.
Mais dans un cas, un comportement, une manière de s'exprimer, paraissent anodins, dans l'autre, ils servent à entretenir l'illusion d'une rupture nette entre hommes et "monstres" (sous-entendu ceux qui basculent dans une horreur dont on ne souhaite pas admettre la proximité avec ce que nous, êtres humains "normaux", parvenons à refouler la plupart du temps).

Bref, ce livre m'a l'air intéressant, il faudra que je vois ça de plus près.
Merci en tout cas pour toutes ces idées de lecture "alternative". ;o)
Gromovar a dit…
My pleasure :-)