La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

Big stick


"La paille dans l'oeil de Dieu" décrit la première rencontre entre une civilisation humaine spatiale et une race extra-terrestre intelligente et technicienne. Qu'on ne s'arrête pas au thème space-op déjà traité plusieurs fois ! Ce roman est une superbe étude de cas de realpolitik. Par delà l'excitation de la rencontre et de la découverte, les représentants militaires puis politiques de l'Empire doivent assurer la sécurité de la race humaine, y compris en prenant des mesures strictement pragmatiques et dépourvues de tout idéalisme. Confrontés à une altérité radicale les humains doivent d'abord ne faire aucune fausse maneuvre (un des personnages dit qu'il va devoir jongler avec des oeufs de grande valeur en faible gravité). Le livre manie parfaitement les questions de nécessité, de sacrifice nécessaire, d'indispensable réduction de l'incertitude. Il montre comment gouverner c'est se préparer éternellement à tout, y compris au plus imprévisible, et prendre par avance les mesures appropriées. Il oppose de manière magistrale l'éthique de conviction des savants à l'éthique de responsabilité des politiques. Et il le fait d'une manière riche et novatrice en insistant sur trois points. Tout d'abord il met en scène des personnages de politiques ou militaires qui ne sont pas des bêtes sauvages ou inhumaines ; ils ont des doutes mais ils suivent toutes les voies, y compris les moins probables, jusqu'à leurs conclusions extrêmes, dans l'optique de limitation des risques qui est leur préoccupation unique (c'est ce que nous faisons aussi quand nous stockons des millions de dose de Tamiflu en prévision d'une hypothétique pandémie aviaire). Puis il montre que l'"Autre" a aussi des intérêts et des priorités. L'"Autre" pratique aussi la realpolitik. Il n'y a pas les méchants "nous" face aux gentils "eux". Leur intelligence, comme la nôtre, les pousse à la prudence et à choisir la meilleure solution disponible, même si celle-ci n'est pas absolument satisfaisante. L'"Autre" ment comme nous, il a des intérêtes propres comme nous, il cherche des alliances comme nous, y compris en divisant l'adversaire. L'"Autre" n'est ni la brute abrutie de "La guerre éternelle", ni un E.T. au long doigt aussi amical que celui de Dieu dans la chapelle sixtine. L'"Autre" est simplement intelligent, avec tout ce que ça implique. Enfin le roman montre magnifiquement comment la méfiance réciproque conduit à des pertes de temps et des solutions sous-optimales ; mais à ceux qui me diront que ça signifie qu'il vaudrait mieux être confiant et amical, je rétorquerai que la théorie des jeux a malheureusement prouvé le contraire.
Malgré quelques éléments qui font un peu vieille SF (le mariage en particulier est assez surréaliste, ou l'alambic à whisky), "La paille dans l'oeil de Dieu" est un grand livre qu'il faudrait faire lire à tous les étudiants en géopolitique. Tiens, puisqu'on en parle, plus je pense au livre, plus je pense au conflit israélo-palestinien (y compris pour des raisons que je ne peux donnner ici sous peine de spoiler).
La paille dans l'oeil de Dieu, Larry Niven et Jerry Pournelle

Commentaires

Anonyme a dit…
Bien d'accord, j'avais beaucoup aimé aussi. Et effectivement, sur le plan des relations internationales, c'est sacrément bien foutu. Un très bon livre de SF. Space op' certes, avec des militaires dedans certes, mais vraiment pas con pour autant ; et ça fait du bien !
Gromovar a dit…
Tout à fait :-)
Anonyme a dit…
J'avais aussi été très agréablement surpris. Un excellent roman bien conçu.