La Cité des marches - Robert Jackson Bennett

Bulikov, la capitale du Continent. Autrefois une ville grande et puissante, le centre du monde. Aujourd’hui une ville conquise, en partie détruite. Rome après Alaric. Kind of. Dans le monde de La Cité des marches , dernier roman traduit en français de Robert Jackson Bennett et premier volume de le trilogie des Cités divines , il y a le Continent et le reste – ce centre-périphérie théorisé au XIV siècle par le grand historien arabe Ibn Khaldoun . Et, comme dans l’analyse de ce dernier, la périphérie a fini par conquérir le centre, en l’occurrence le Continent ; rien d’étonnant, ce n’est qu’à la périphérie que résident la force et la détermination nécessaires à la guerre. Concrètement, c’est une révolte conduite avec succès il y a plusieurs décennies par le Kaj qui a abattu l’empire continental et ses dieux. La chute des uns entrainant celle de l'autre. Car tu dois le savoir, lecteur, le pouvoir sans égal du Continent était le fruit des « miracles » de ses six dieux, incarnés dans le

Exit ZEP et ZUS


Un des livres excellents pour lesquels j'ai créé ce blog. Un livre que j'ai envie d'obliger tout le monde à acheter.
Après "Trois leçons sur la société post-industrielle", nouvel opuscule brillant publié par "La République des Idées", qui est vraiment une république très fréquentable.
"Le ghetto français" décrit et explique les phénomènes de séparatisme social à l'oeuvre en France, et dont les quartiers d'exclusion ne sont que la conséquence ultime et visible. En faisant un usage inédit des données de l'Enquête Emploi de l'INSEE, Eric Maurin prouve l'existence d'un mouvement permanent de séparation/ségrégation des hommes par rapport au lieu d'habitation. Il montre comment chaque groupe social tend à s'éloigner autant que possible de ceux qu'il considère comme "inférieur". Il montre, là aussi avec des données inédites en France, que ce choix est "rationnel" car l'environnement de voisinage est un facteur explicatif fort des trajectoires scolaire et professionnelle, et donc comment le lieu d'habitation "canalise" un destin probable (inégalité suprême) et devient de ce fait un enjeu de lutte (je me fais un petit fix de Bourdieu, ça fait pas de mal). Il montre enfin comment les politiques de lutte contre les inégalités qui ciblent des territoires (les ZEP et les zones franches étant deux exemples caractéristiques, l'un initié par la gauche, l'autre par la droite) échouent car elles oublient de prendre en compte le facteur "voisinage" qui ne pourrait l'être que par une action directe et concentrée sur les personnes les plus en difficulté, l'effet positif se diffusant par capillarité. Il arrive alors aux mêmes conclusions que Thomas Piketty, qu'il cite, en prônant des classes aux effectifs très réduits pour les élèves les plus en difficulté, quitte à augmenter l'effectif dans les classes qui ne posent pas de problème particulier (là il se met mal avec le SNES) ou un nombre plus réduit de bourses d'un montant plus élevé pour l'enseignement supérieur (là il se met mal avec l'UNEF). Car si l'inégalité scolaire était efficacement combattue, le besoin de ségrégation spatiale et d'évitement s'amenuiserait, voire à terme disparaîtrait. Sans rêver à un monde parfait, il ne serait pas idiot de tenter de s'en approcher.
Le ghetto français, Eric Maurin

Commentaires

Anonyme a dit…
Que d'émotion qui se dégage de ce commentaire ! Il me faudrait malheureusement plusieurs vies pour lire tous les livres que tu recommandes, je crois que je vais devoir me contenter dans la plupart des cas de ton résumé. Alors continue, je me cultive au passage !!
tiberix a dit…
Autant je suis habituellement en mode de lecture passif sur ton blog ma poule (oui pour les autres lecteurs, nous nous connaissons dans la vraie vie depuis très longtemps et certaines familiarités d'usage dans cette vraie vie vont malheureusement persister ici) autant là je me dois de réagir sans même avoir lu l'opuscule que tu cites... Car en effet ce que tu en résumes télescope une de mes lectures récentes du prix Nobel Thomas C. Schelling : "Micromotives and Macrobehavior".

Le vénérable Schelling explique avec force détails la théorie qui lui a valu son million de dollar et l'admiration des foules : comment de petites stratégies élémentaires d'une foule d'acteur peut conduire à une organisation macroscopique extrêmement tranchée.

L'exemple classique étant justement le fait que aux états-unis dans une banlieue moyenne résidentielle où il y a des voisins noirs et des voisins blancs, le fait que grosso modo une famille blanche préfère ne pas être entourée complètement de voisins noirs et réciproquement, ne conduit pas à un équilibre moyen (une famille noire, une blanche, une noire, une blanche, ...) mais à une séparation drastique en une sous-banlieue blanche et une autre noire.

Je résume (mal) et Schelling a l'habileté de rendre 262 pages de théories illustrées par des anecdotes de ce type, parfaitement digestes, surprenantes et stimulantes.

Tout cela pour dire que monsieur Maurin gagne probablement à être lu à la lumière de monsieur Schelling : les statistiques sociales sur-interprêtent-elles une simple auto-organisation élémentaire ?

Ou dans le contexte des primaires US : il y a-t'il un plan intelligent dans la nature ou faut-il croire en Darwin ?




Si la question vous amuse : http://www.amazon.fr/Micromotives-Macrobehavior-Thomas-C-Schelling/dp/0393329461/ref=sr_1_9?ie=UTF8&s=english-books&qid=1199905705&sr=8-9

(désolé c'est dans la langue de Richard Nixon, mais une VF doit être trouvable)
Gromovar a dit…
Je me rue sur le Schelling à la condition expresse qu'il soit plus développé que l'"Emergence" de Steven Johnson qu était vraiment trop dans la vulgarisation. Mais ça m'intéresse carrément, donc ça va se terminer par un achat (si tu avais une idée de mon budget Livre tu ne m'imposerais pas ça). Je crois vraiment que l'émergence est l'une des grandes théories explicatives de la réalité sociale. Je crois aussi que, comme elle ne se manifeste que dans le temps long, elle est une critique matérialisée de l'alternance incessante des politiques publiques dans les démocraties électives.
Gromovar a dit…
Voila c'est commandé. Mon compte en banque te remercie !
tiberix a dit…
C'est non seulement plus développé, mais le livre commence par la description de l'étincelle qui a fait naître cette théorie chez Schelling : une conférence dans un amphithéâtre où ls étudiants se retrouvèrent tous assis dans la moitié supérieure de la salle, alors que la moitié inférieure se trouvait désertée. S'en suivent plusieurs pages où Schelling passe en revue toutes les explications possible à cette organisation spontannée...


Un vrai bonheur.
Celvec a dit…
Commandés. Merci de ces ,toujours pertinents, conseils de lecture. Si c'est aussi brillant que le livre de Cohen, ca laisse augurer de bons dimanches, d'autant plus que ca a l'avantage de s'inscrire presque pafaitement dans le programme de T.ES.

ps: Avez-vous un avis sur " L'inflation scolaire" de Marie Duru-Bellat ? La aussi je crois que c'est potentiellement un serieux "bonus" a l'ensignement T.es.

Bonne soirée.

César.D-Adrien.M
Gromovar a dit…
Je crois que un très bon livre aussi. Je me tâte depuis quelques temps pour l'acheter, ce qui singifie que je vais finir par le faire après avoir hésité 3 semaines en vain.
Celvec a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Celvec a dit…
Il est commandé celui la aussi... Mais si je demande votre avis, outre l'interet que j'y porte, c'est aussi pour moins souffrir d'un débit de 10 euros sur un compte qui n'en crédite pas beaucoup plus. L'achat rassuré est moins chèr car en achetant un mauvais livre ce n'est pas seulement le cout de ce livre que l'on perd mais toute le capital qu'un bon livre aurait pu engendrer.

Si je le recoit avant jeudi au soir, il sera entierement lu avant le mardi 22 janvier, date fatidique d'une QSTP type bac sur la stratification sociale et la mobilité... ==>
http://www.starstore.com/acatalog/speedy_bank.jpg

Toute ressemblance est fortuite.